Une recension de Jacques Sicard
12/06/2014
L’Eclipse
de Michelangelo Antonioni
L’Eclipse – longue séquence de fin, qui suit la progression du crépuscule, avec silhouettes éparses, pressées de disparaître : 42 plans en 7 minutes – les deux chiffres (7 et son multiple 42) sont climatériques, selon les Anciens, à savoir chargés de menaces, lourds de dangers – cela qui s’accomplit au quarante-troisième et dernier plan : l’éclipse inversée, la lumière artificielle d’un réverbère qui occulte toute la nuit, intérieure et extérieure, présente et à venir.
Un peu avant, Antonioni croise les persiennes sur la beauté assonante de deux yeux féminins qui alternent avec deux yeux masculins, dans une pièce obscure où les corps se sont vite baisés et aussi vite débaisés. En légère contre-plongée, on les devine. La demi-nuit de leurs visages frappée à l’oblique par une lumière qui n’est pas plus celle du soleil dont les rayons se faufilent mal entre les lamelles des volets, que celle des Cieux de l’Art sacré. C’est le reste de leurs caresses qui luit et c’est ce reste qui se réfléchit dans leurs yeux. Et qui brûle désormais sans que plus rien ne l’alimente. Brûle comme brûle, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, l’ampoule grillagée d’une cellule de privation sensorielle.
Jacques Sicard
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