Poèmes à Gaëlle, XVI
16/05/2015
XVI
Je t'écris je rêve sur cette marge
où passent les songes
nuages légers et nuits épaisses
le présent qu'ils se font l'un à l'autre
dans l'instance du présent
J'avais entre les mains deux livres
secoués de leur poussière
c'était là notre histoire
tour à tour souterraine et résurgente
elle escortait ton ombre
Eve disait : dieu que la terre est lente
et le bleu de Prusse du ciel
se mêlait aux touches de la palette
Gaëlle en inspirait les couleurs
Je t'écris je rêve sur cette marge
sous cette aile qui se met à battre
le coeur jaune d'un tournesol
l'agile navette du tisserin
et la ciboulette de Chine
que Mei a plantée
au pied du cyprès pendulaire
C'était Augustin Meaulnes
qui passait dans l'allée
nous le saluions de concert
et les feuilles sous ses pieds
bruissaient comme les mille
mailles d'un rideau de perles
agitées par un vent coulis
Eve ajoutait : j'ai de mes yeux vu
l'Instant premier se défaire
de la cielleuse immobilité
lançant le temps universel
la synchronie inachevée des sphères
Dieu que la terre est lente
j'ai marché dans les étoiles
nommé les constellations
peau expeausée d'un univers
libéré de lui-même aveugle aussi bien
que me restait-il au juste si ce n'est
l'intériorité même d'un extérieur infini
Je t'écris je rêve sur cette marge
où l'eau sculpte indéfiniment la pierre
ce qui se brasse et se rassemble jusqu'au vertige
les étoilements fleuris des cristaux
les ciselures des récifs de corail
déjà le Matin nous disait
à demi mots la bonne aventure
sur l'ocre clair où réapparaissait
l'Hélène de mon enfance
qui me donnait le chemin
et la solennité magique du poème
fleuri dans une simple goutte d'eau
et simple goutte d'encre
Daniel Martinez
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