"Fondations", de Michel Camus, éd. Lettres vives, mars 1987
19/05/2016
Dans la lignée d'un Roberto Juarroz, ce poète de haute volée s'interroge sur l'union des contraires, dans ce qu'il nomme "le néant de soi" qui répond au poème du monde, "sans commencement" ni fin, "l'homme-objet" répondant à "l'univers-sujet". Cette fusion pressentie s'accomplit dans le plus parfait "silence des dieux" :
"Au bord de l'eau, une minuscule déesse mère d'il y a dix mille ans. L'homme qui la ramasse la regarde sans la voir et la rejette à l'eau.
Le regard de l'homme, disait-il, est prisonnier de l'homme. Seul le regard sans yeux n'est réellement délivré de l'homme-et-des-dieux que s'il est réellement relié à la Vacuité divine sans l'homme et sans dieux.
(L'Enigme, se dit-il, nous travaille sans se nommer)
* * *
Ou bien toute pensée est déchet, fumier organique, poussière dans l'oeil, battement de cils.
Ou bien germe d'éveil ou engrais, réveil ou nuit blanche du silence, lumière du regard sans yeux jouissant de soi sans visage.
Ou bien toute image est image de nuage, éclair de chaleur, parole de brume, bavure de vent, bouffée d'éther, éloignement ou déchirure, bâillement inachevé de la nuit."
Michel Camus
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