La Girafe, fabuleuse anomalie de l'évolution (première partie)
22/08/2015
On raconte beaucoup de choses sur la girafe. On dit, par exemple, qu'elle met son petit au monde sans se coucher, et que celui-ci, après quinze mois de gestation, tombe de deux mètres de haut, parfois au prix de sa vie. On dit aussi que sa langue noire, longue de 50 centimètres, se creuse en gouttière pour se glisser entre les épines d'acacia et accéder aux jeunes pousses. Et encore qu'elle vit en troupeaux lâches de dix à soixante-dix têtes, dominés par un ou plusieurs grands mâles, mais conduits par une femelle...
Tout cela est vrai. Il est faux, en revanche, que la girafe soit muette : elle peut émettre divers sons, allant du ronflement (en cas de danger) au grognement, en passant - cas extrême et associé au rut - par le beuglement. Mais sa morphologie semble si bizarre, et son écologie tellement exotique, qu'on peut finalement s'étonner que les idées reçues à son sujet ne soient pas plus erronées.
Car la girafe a beau être connue de tous, et avoir été choisie comme animal fétiche par le Muséum national d'histoire naturelle (qui n'exhibe pas moins de six adultes et deux girafons empaillés dans sa galerie de l'évolution) : de tous les mammifères populaires, elle reste le plus énigmatique. Comme à l'automne 1827, en ce temps où la foule se pressait dans le port de Marseille pour voir débarquer, du navire où dépassait sa tête, le spécimen réclamé par Charles X pour sa collection royale.
Sa taille, à elle seule, paraît une invraisemblance de la nature - de 4 à 5,50 mètres en moyenne, pour un poids d'environ une tonne. Pour la dessiner, il suffit de tracer, du cou à la queue, une pente inclinée vers le bas : ses pattes antérieures sont plus longues que les postérieures, si longues, même, qu'elle préfère souvent dormir debout plutôt que de se donner la peine de les plier. A l'autre extrémité, la girafe est la joliesse même. Tête fine, doux yeux bordés de longs cils, petites cornes (deux dès la naissance, deux ou trois de plus chez certains mâles) doublées de velours... L'ensemble est si délicat que le regard en oublierait presque la distance franchie pour en arriver là.
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Catherine Vincent
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