Lionel Bourg nous accompagnera in Diérèse 75
20/12/2018
Ma phrase en procéderait-elle ?
Myope, bourrelée de repentirs et d’imprécisions, elle creuse et, creusant, forant comme taupe les matériaux de sa grammaire, obéit d’instinct ou par obstination aux méandres de la mémoire, le travail d’écriture – « travaux » serait plus judicieux, le pluriel sied au va-et-vient opiniâtre des aiguilles – n’investirait-il que le tremblement d’un feuillage. On n’écrit pas sans crainte. Sans volupté pourtant. De sorte que l’amoureuse initiation des débuts ne déflore ni la virginité des mots ni la candeur hypnotique d’une facture que l’on étreint toujours pour la première fois.
Explication superficielle, s’agaceront les linguistes. Je ne m’en formaliserai pas. Le temps, ou la durée, la durée qui goutte aux commissures du langage, s’épanchant sous la plaie qu’écrire ne cautérise ni ne panse, le scribe, courbé sur sa tablette, un cahier ou le clavier de son ordinateur, ne supportera plus d’être comme hier le jouet de phobies indécentes. Roi pêcheur sans royaume, gardien moribond du Graal, et des romans, du poème, il hissera dans sa chaloupe un filet où ne brilleront que des ectoplasmes...
Lionel Bourg
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