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Le soir tombe. Le car est monté sur un bac pour traverser le delta du Bramapoutre. Le dos appuyé sur le bastingage, je compte les dizaines de camions qui s’entassent avec nous. Des images de naufrage vues à la télévision me traversent l’esprit.
Des enfants de trois-quatre ans traînent des seaux de boissons fraîches et les vendent en riant. J’ai sympathisé avec les deux jeunes garçons. Ils m’expliquent gênés qu’ils n’ont pas le droit de parler à une femme européenne. Nous voguons, je regarde le fleuve argenté dans la nuit, la lune. Soudain sur l’eau, la flamme d’une bougie, une lanterne, une petite voile, une barque minuscule. Le pêcheur ne bouge pas. Brume, silence. Deux heures magnifiques viennent de passer.
De nouveau le car et puis Dakka. Je refuse le grand hôtel proposé par le chauffeur, je me retrouve dans une chambre sans fenêtre. J’écrase quelques insectes sur le drap taché. Je m’endors – poussin fatigué - dans mon duvet tout propre.
Le train roule depuis midi. Allongée sur ma couchette, je somnole. Je bois du sirop au basilic pour calmer ma toux. Des voyageurs m’invitent à descendre, à partager leur pique-nique. J’imagine les piments que je vais devoir avaler. Je m’excuse, j’explique ma bronchite. Je me rendors. Je me réveille au petit matin.
Nous avons huit heures de retard. Je m’assois près d’une fenêtre, je bois du tchaï. Je ne pense à rien ou peut-être à quelques amis français. Dehors, des marchés, des chemins bordés d’arbres maigres, des temples, des mares. Le bruit du train. Les voyageurs jettent leurs détritus par terre. Plus tard, un homme vient passer un coup de balayette contre quelques roupies. Parfois le train s’arrête longuement.
Tous les passagers descendent le long de la voie pour se dégourdir les jambes. Je reste à ma place de peur de ne pas savoir remonter assez rapidement. J’aimerais savoir boire à l’indienne, sans toucher la bouteille ou le verre avec mes lèvres.
Je profite des arrêts pour m’entraîner. Je m’étrangle ou bien l’eau déborde de ma bouche. Les enfants rient, me montrent. En fin d’après-midi, Haridwar station, je descends. Je hèle un rickshaw. Une amie m’a prévenue, le prix de la course ne doit pas dépasser 10 roupies. Pour Khankal, 10 roupies, c’est d’accord ?
Non Madame… Pour la moitié, c’est d’accord.
Le rire et le chargement de mes 25 kilos de bagages sont gratuits.
Claire Landais
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