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Eric Chassefière est un poète de qualité assurément, qui ne me semble pas reconnu à sa juste valeur (un mystère de plus). Mais lisez-le plutôt...
[Tiens, une remarque au passage, me concernant : j'écris directement mes poèmes sur un ordinateur portable, ces temps-ci dans la catégorie "Séquentielles", vous aurez remarqué que la version "définitive" suit de quelques heures voire de quelques jours, le premier jet. Au demeurant, rien n'est figé.]
Le temps coule à travers les arbres
le soleil illumine l'horloge du clocher
tout glisse dans le soir
tout respire à la source de l'être
le ciel fait lisière du proche
il est le silence de la vague
le feuillage murmurant le toit
la transparence d'une rangée de pins
découpant sa fragile nuit de lumière
dans le rêve d'ici de l'étendue
puis le ciel encore qui fait cercle
autour du lieu de vibration des cordes
réunies en un sextuor de voix sombres
entre schistes battus d'écume
et ligne épurées des falaises en surplomb
musique difficile ramassée puissante
rugueuses sonorités des instruments
qui se mêlent aux cris des mouettes dans le vent
immédiateté de la lumière à saisir les corps
toujours ce ciel à même la peau
cette lumière qui paraît peinte
cette présence solaire des musiciens
sous le balancier de leur instrument
ces harmonies austères à la rocailleuse pulsation d'éternité
Fort Sarah Bernhardt (Deuxième sextuor à cordes de Johannes Brahms)
* * *
La musique ici résonne dans les corps
les relie par le souffle et la pulsation
l'oreille écoute et chante
les doigts retiennent et expriment
les voix fuguées entrent tour à tour
l'unisson de la basse violoncelle et clavier tend sa toile
porte le dialogue de l'alto et de la flûte
irradie le jeu serré des harmonies
du sourire lumineux des bras s'accordant
dans la plénitude du même geste d'enclore
élargir la résonance jusqu'au corps
l'unanime silence du corps
dont la vibration est musique
car c'est du silence que tout naît
se déploie à partir du centre
que la musique s'ouvre comme une fleur éclot
dans l'équilibre du cœur et de la lisière
voilà ce qu'est cette Offrande Musicale
infini développement de lignes et de contre-lignes
magnifique sculpture de la beauté réalisée
naissance en cristaux du complexe
dans l'originel silence du simple
dont ensemble esprit et corps se régalent
partageant la même soif de sagesse et d'équilibre inné
Bangor (Allegro de l'Offrande Musicale de Jean-Sébastien Bach)
Eric Chassefière
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