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En mer
Au point le plus haut
où la science est oubli de tout savoir
et certitude, me dit-on,
certitude irréfutable venue à notre rencontre
où dans le temps suspendu au fil
d'un regain d'enfance,
entre sommeil et veille, entre innocence et faute,
là où se trouve et ne se trouve pas notre œuvre voulue et choisie.
"La santé de l'esprit
est là", dit une voix
que j'affronte depuis des années,
une voix aujourd'hui de sirène.
Nous naviguons entre Sardaigne et Corse.
La mer est agitée
et le bateau piquant du nez dérive.
L'équipage dort. Mais deux hommes
veillent dans la demi-lumière de la passerelle.
Août a pris fin. Nous sommes à la rupture des temps.
C'est une nuit vivante.
Vivante plus que cette nuit,
vivante à me serrer la gorge
est la muette confiance
de ceux-là qui dorment
assurés dans la main des autres
et de ceux-ci qui n'abandonnent ni la manœuvre ni le calcul
alors que d'un point obscur de la côte elles prient
pour leurs hommes en mer, alors que des abords
du Rhône arrivent quelques rafales.
Mario Luzi
trad. : Philippe Renard et Bernard Simeone
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