"Le malheur, mon grand laboureur..." : "Meidosems", d'Henri Michaux, éditions Le Point du jour, 31/10/1948, 95 pages, 297 exemplaires
18/02/2021
Le 23 février 1948, Henri Michaux perd sa femme Marie-Louise, suite à un accident domestique (au cours d'une séance de repassage, sa robe de chambre en nylon qui prend feu la brûle vive ; elle en meurt un mois après) et il invente alors ce tout dernier peuple imaginaire dans son œuvre, les Meidosems, en manière d'exorcisme. Son recueil paraîtra huit mois après le drame. Nombre de fragments de son livre sont hantés par l'image de la femme aimée défigurée, et par l'impuissance du poète à inverser l'issue fatale : « Meidosem à la face calcinée ». Pour lutter contre l'horreur, il ne reste plus à Henri Michaux qu'à spiritualiser le corps souffrant, avant son passage vers le "Grand Opaque".
« Des ailes sans têtes, sans oiseaux, des ailes pures de tout corps volent vers un ciel solaire, pas encore resplendissant, mais qui lutte fort pour le resplendissement, trouant son chemin dans l'empyrée comme un obus de future félicité. / Silences. Envols. / Ce que ces Meidosems ont tant désiré, enfin ils y sont arrivés. Les voilà ».
C'est ici la page 63 (sur 68, au total) du tapuscrit, avec de nombreuses ratures et corrections à l'encre et au crayon, ensemble sur lequel a travaillé directement l'éditeur René Bertelé. Autres temps !
La dédicace de Michaux à son éditeur : "A René Bertelé qui a bien voulu ne pas considérer comme négligeables les frêles Meidosems quand ils étaient à peine à l'horizon et prêts à s'y reperdre. Au plus encourageant des amis. H. Michaux". L'auteur a signé deux fois sur la dernière page.
Henri Michaux, l'une des 13 lithographies de Meidosems,
tirées à même la pierre par Desjobert
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