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Le poème est accompli quand il éclaire en s'effaçant ce qui l'éclaire. Il ne l'a pas voulu, à vrai dire, il est alors inoubliable.
La jeunesse dans l'extrême vieillesse : les gestes de certains peintres deviennent avec l'âge plus audacieux, plus libres. Y a-t-il une malédiction qui condamne les poètes à l'étouffement? Si la vigueur les a désertés, ils en sont responsables. Ils n'avaient pas à se ménager pour l'économiser, ils en ont fait un mauvais usage. Qu'ils n'accusent pas l'ordre impérieux du langage verbal : ils l'ont d'autant moins transgressé qu'ils avaient de leur œuvre une conception étroite. Une œuvre, s'il est permis sans orgueil d'utiliser ce terme, n'aura de justesse que si elle est insoucieuse de son sort, elle n'aura pas peur de sa fin, elle fera mieux que maintenir intacte l'énergie, la confiance initiale, elle l'augmentera. Quelle que soit notre activité, cette confiance nous est offerte, mais les poèmes ont ce mérite de l'intensifier. Le port, le bon port, disent-ils, l'origine : nous sommes prêts à repartir sans savoir où ni comment. Ils disent encore que l'allégresse est inépuisable, du voyage. Nous les entendons mal, ils sont plus que nous généreux.
Pierre Dhainaut
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