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Le 27 décembre 1927, Michaux embarque sur le Boskoop, dans le port d'Amsterdam, à destination de Guayaquil (Équateur). Au regard de "l'anticalendrier de la mer", il va noter presque jour après jour les étapes de ce voyage pas comme les autres. Fourbu, il revient au port d'attache le 6 janvier 1929 et confie quelque temps après son tapuscrit à Gaston Gallimard.
Il a déjà écrit "Les rêves et la jambe" (plaquette), "Fables des origines" (éd. du Disque vert), a publié "Qui je fus" à la N.R.F. Voici l'un de ses poèmes de voyage, puisé dans la version originale d'Ecuador, pages 154-155 :
* * *
Samedi 3 novembre en pirogue souffrant et sans doute avec fièvre.
Prêtez-moi de la grandeur,
Prêtez-moi de la grandeur,
Prêtez-moi de la lenteur,
Prêtez-moi de la lenteur,
Prêtez-moi tout,
Et prêtez-vous à moi,
Et prêtez encore
Et tout de même ça ne suffira pas.
Le désespoir est doux,
Doux jusqu'au vomissement.
Et j'ai peur, peur.
Quand la moelle elle-même se met à trembler,
Oh ! j'ai peur, j'ai peur
Je n'y suis plus, je n'y suis presque plus.
Oh, mon ami,
Je m'accroche à ton souvenir.
A ta haute stature,
Je m'accroche mais je tombe,
Je me lâche.
Je n'étais donc pas tellement moi-même qu'on me l'avait dit.
Je vis à la renverse.
Encore un jour ? encore deux ?
Et Iquitos d'ici est encore à 12 jours.
Henry Michaux
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