241158
Tous les vivants
Tous les vivants ont l'âge du monde. Le vieillard livre à l'enfant les clefs de la ville, que cela lui plaise ou non. Les revenants n'y comprennent plus rien, ils sont fixés, papillons bleus de la Guyane, papillons bleus de la nuit.
Tous les vivants rompent les faisceaux quand l'aube fuit. Tous les rêves ficelés, tous les rêves entassés, linges inutiles, à coups de bottes joignez votre ombre et votre honte ! Les genoux pèsent sur les poitrines. L'ordre doit régner. Les clairons sonnent la diane quand la lune disparaît.
Tous les vivants chantent l'avenir. Pour apaiser les mondes morts. Pour des mots qui enivrent, venus on ne sait d'où, de quels terribles déclenchements et qui font heurter les peuples en rivières de murmures, en rivières de blessures, paquets de chaînes, lambeaux d'amour.
Tous les vivants fuient la maison natale. Les chevrons pourrissent, les parquets se disjoignent en reliefs géographiques pour jouer au soldat, les fenêtres battent comme des voiles quand on vire mal, quand on manque la passe bienheureuse. La racine pousse son couvercle, le vieux prunier renaît dans le cuivre des lampes, la chute des grands pans dans l'eau du lac.
Maurice Blanchard
Les commentaires sont fermés.