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On n'écrit pas les cris. La voix, sans les mots, est cette énigme : on n'écrit pas la plainte des cris. La voix se plaint, non les mots de la plainte. Les cris de la plainte, pourtant, ne sont pas la voix comme sons et rythmes. La plainte est dans le sens des mots qui cessent d'être des mots quand le sens, en eux, cesse de suivre son cours : quand le sens est, en eux, comme les eaux tourbillonnaires, comme les brisants, les touffes d'écume, les vagues de pluie que le vent plaque aux vitres ; quand le sens est le sang du corps formant des caillots noirs dans les veines.
Écrire affronte un monstre qui est sa propre altérité et l'altérité de tout autre. Ça fait plaie. Écrire serait panser les plaies ouvertes par l'écriture.
Être la voix qui, dans les pires moments de silence, n'a jamais cessé de parler.
On ne passe pas de la parole au silence ni du silence aux mots. Mots et silence occupent les mêmes lieux dans le corps et la pensée. Chacun occupe les lieux en tous points, pourtant ils ne sont pas le même. Le poème donne ensemble, manifestement, les mots qui parlent et leur silence, la vérité et la présence.
Marc Le Bot
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