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Moins connu que d'autres poètes francophones, proche-orientaux : originaire du Liban comme la parisienne Vénus Khoury-Ghata, ou de Syrie comme le courbevoisien Adonis (Ali Ahmad Saïd), c'est un auteur à (re)découvrir, dont la poésie, en vers ou en prose, sait magnifier la Légende, cherchant appui sur le temps pour l'enchâsser à la trame d'un renouveau, en gésine. Né à Sahel-Alma (Liban) en 1914, il décède, jeune encore, parmi ses livres dans l'incendie de sa maison, en 1958, brûlé vif qu'il fut. Son lit prit feu à cause d’une cigarette, pendant qu’il somnolait (de santé précaire, il prenait de la morphine pour calmer les douleurs qu'il ressentait).
En 1936, il publie son premier recueil, Poèmes de l'été, aux éditions du Liban, ouvrage couronné par l'Académie française. Sur ce, il essaiera de se faire publier par la NRF, mais sans succès - pourtant appuyé par une lettre de Gabriel Bounoure, et recommandé par Valéry à Paulhan, en ces termes : « Il vous apporte aussi un petit volume de poèmes en prose (mais non sans quelques vers) où j’ai trouvé des beautés certaines et une promesse véritablement rare de poésie aiguë, parfois – comme il sied – trop douce. » Au lieu de quoi, il publiera en 1942 à L'Orient (à 125 exemplaires) Nouveaux poèmes et Proses pour une pensée (édité en 1945 à 85 exemplaires). Même acharnement du destin sur les œuvres du poète encore inédites : il aurait composé un Faust, un ouvrage intitulé Abnaël que Grasset lui avait promis d'éditer, sans suite ; et un grand poème, Jérusalem. Le pillage de sa maison en 1958 a dispersé ses manuscrits...
Jean-Claude Villain a rendu hommage au poète Fouad Abi Zeyd dans son livre Lettres du monde, (Editions Petra, Paris, 2017).
Méditerranée
Vers le milieu de cette plage, en hâte, en courant, bourdonnant de soleil et détaché de mon existence terrestre, je bataille avec l'écume et vis un long temps dans un Olympe d'Asie. Jamais le soleil ne fut plus beau que sur la mer.
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A présent, c'est en vain que la minute m'entraîne : un ciel qui parle de beauté au même ciel atteint l'éternité. C'est pourquoi je cherche en passant l'odeur des filles grecques ; mais la mer absolue remonte à sa genèse ; les vagues murmurent un amour d'Aspasie, qui, un jour pareil, le sein tendu jusqu'à se rompre, s'emmêla à un roi de Grèce, et jouit au milieu des symphonies universelles.
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Je remonte à leurs cris et vis de leurs frissons, de leur tumulte - de baisers. Car je suis fils de dix mille ans de rameurs, de songes asiatiques et d'ivresses. Aussi loin que je m'enfonce en cette mer, je me souviens des voyages que j'entrepris quand je n'étais qu'un frémissement de mes aïeux, parmi le cortège étincelant des trirèmes menant vers Alexandrie ou Byzance. Je me souviens d'avoir rencontré Aphrodite ; Chrysis ; et, un peu plus loin, sur le Nil, toute une nuit, d'avoir vécu du corps de Cléopâtre.
Fouad Abi Zeyd
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