Béatrice Douvre (1967-1994)
07/05/2016
Un destin foudroyant, une écriture sur-le-champ reconnaissable, Béatrice Douvre s'éteint à 27 ans à peine ! Pas un suicide nous dit-on, si tant est que l'anorexie dont elle souffrait ne puisse être assimilé à une fin volontaire... La flamboyance de ses images, les jeux de sens et de sons, les mots et les idées se télescopent. Une sensibilité qui défie les règles de l'entendement simple, tout "cartésianisme" mis à bas.
Déconstruction/reconstruction, ainsi vont se générant à mesure les mille entrées possibles au coeur de l'écrit. On peut légitimement se demander pourquoi Béatrice Douvre n'est pas mieux reconnue dans l'univers poétique, sans doute faute d'une lisibilité éditoriale suffisante. Peu de poètes en effet depuis Rimbaud ont su donner une telle densité à leurs vers, écoutez plutôt :
Un enfant roi me dicta la feuille brisée.
Dans la coupe il tenait le sable sang.
L'eau chantait.
Rayons de rivière, amoncellement de limons verts.
Vomissures d'argent au bruit des marées. L'eau
debout finissait en barques sur le ventre.
Des charrettes de fruits crissaient sur le sol roux. Des enfants
costumés riaient, dont j'attendais le baiser blond, la candeur mûre.
Contre mes pas obscurs se hissait l'épaule d'un dieu mort,
j'arrivai au dernier port, l'ange qui se hâtait me quitta, et j'ai
marché, légère, car marcher maintenant m'éclairait.
Béatrice Douvre
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