241158

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Henri Thomas

”Une voie pour l'insubordination”, Henri Michaux, éditions Fata Morgana, 72 pages, 15/5/1980, 1 800 exemplaires

AU COMMENCEMENT EST LA DEMEURE, le local d'habitation, ce qui entoure, contraignant par excellence, la maison.
L'enfant est pour les mouvements libres. Le petit d'homme, dès les premières années, la maison, siège d'interdits nombreux, l'impressionne.
Dans cette prison "demeurent" et sont à demeure des meubles et objets lourds, le tout beaucoup plus détestable (s'ils sont détestés), plus haï et vainement haï, plus inoubliablement que les parents, plus habité d'occulte, plus figé, plus appuyé (et au début de la vie, plus gigantesques). Là se déroule le rituel du quotidien qui paraît ne devoir finir jamais.
Ainsi les meubles et les pièces et leur ordre impératif infligent un dommage quotidien aux enfants, à leur besoin de tumulte et d'indépendance, à leur envie de gambader et de voir tout sens dessus dessous.
Ce "tout" contraignant, symbole des contraintes et des règles, ces murs qui enserrent, séparent, enferment inflexiblement, représentation par excellence de l'adulte, du terminé, du figé, là où il ne se passe plus rien : la demeure, cela ne pourrait-il à son tour être attaqué, brimé... et qu'on s'en amuse ?
Dans l'habitation existe le règne des objets précieux, sélectionnés par et pour l'adulte, à respecter, certains fabriqués, construits pour le maître.
L'enfant, par nature n'est pas pour cela, pas pour "leur" choix et "leurs" meubles de prix. Il n'est pas pour construire mais pour détruire, pas pour dresser mais pour renverser, pas pour le chant mais pour brailler, pour le charivari, pour le tapage, pour détraquer, pour l'assourdissant, pour disloquer, pour bousculer, pour tiraillement, pour arracher, pour casser. Toboggan, balançoire sont pour lui le repos et non pas le fauteuil.


Henri Michaux

Lire la suite

24/02/2021 | Lien permanent

”Fille de la montagne”, éditions Marchant Ducel, mai 1984 : l'avant-dernier livre d'Henri Michaux

Fille de la montagne, imprimé en mai 1984 par Gilles Coutet, au Pontet (17 x 21 cm, 28 pages), à 60 exemplaires sur Larroque non reliés et non foliotés, ornés de 4 peintures tantriques, précède de quelques mois la mort du poète. Les peintures tantriques ont été réalisées à Katmandou par des artistes locaux, puis collées sur feuilles. Je n'insisterai pas sur le fait que jusqu'au terme de son existence, Michaux aura gâté la petite édition, en lui confiant des textes de valeur.
Le catalogue de Lucie Ducel, à laquelle Michaux s'est adressé pour l'édition de ce recueil - aquarelliste de son état, qui résidait rue du Chemin Vert dans le onzième parisien, et que j'ai eu la chance de rencontrer avant son retrait définitif de l'édition -, comptait 36 titres à son catalogue, en tout en pour tout ! Signalons que Marchant Ducel (anagramme de Marcel Duchamp) était en fait Franck André Jamme (1947-2020), qui résidait dans un village de l'Yonne, Les Bordes.

* * *

Le troisième tome de La Pléiade est resté un peu vague quant au point-source du recueil Fille de la montagne, que je vais tenter de circonscrire ici. A savoir : Henri Michaux y fait référence au célèbre poème du XVIIe siècle : Exaltation des pieds fortunés de la Déesse, écrit par un lettré sanskrit, féru de grammaire et d'herméneutique, dramaturge et poète lyrique, Narayana Bhatta (1560-1645). Pour résumer ce qu'en dit Paul Martin-Dubost, son traducteur :

La Sripadasaptati (Exaltation des pieds fortunés de la Déesse) célèbre le combat du démon-buffle Mahisa, que ni hommes ni dieux ne peuvent vaincre, avec la Déesse - épouse de Shiva - aux mille bras et aux 28 noms, dont celui de "Fille de la Montagne". Mahisa voulait régner sur tout l'univers, à quoi les dieux répliquèrent en lui déclarant la guerre ; or Brahma avait accordé au démon-buffle le vœu qu'aucun homme ne pourrait le vaincre. C'est donc une femme, née de l'énergie combinée des dieux, qui sera chargée de terrasser Mahisa. Le Roi des montagnes, Himalaya, donnant à la Déesse un lion qui devint sa monture.
Retranché dans le corps du démon-buffle et par la Déesse éperonné, elle attendit qu'excédé Mahisa sorte de la gueule de l'animal pour lui trancher la tête. Par la suite, c'est d'un coup de lance qu'elle massacra deux autres démons, frères de sang.

Ce poème de 71 versets décrit la montée du conflit entre les forces du bien et du mal et célèbre les pieds puissants de la Déesse. Apaisée, ils rougissent alors de l'amour qu'elle porte à ses dévots (autant que du sang du buffle terrassé, ou de la laque qui en couvre les ongles).
Voici à présent les versets 59 et 60 :

59

Il convient, ô Fille de la Montagne, que ton pied égale en éclat le grand pied himalayen ; pour flocons de neige il a ses ongles éclatants ; il est gardien du minerai rouge qui donne la couleur ; les anneaux de ses chevilles sont ses brillants contreforts et il porte d'abondantes forêts, étant aussi l'unique support d'une abondante protection. Les Épouses des Parfaits vivant dans l'Himalaya le servent à la base ; les bardes de la Déesse, eux, célèbrent en ton pied l'Himalaya.

60

Les dieux qui président aux dix directions, chacun tourné dans la sienne, offrent
à tes pieds l'amour incarnat de leur dévotion ; il est dix fois visible à tes pieds
dans l'éclat de tes dix doigts rouges. Toi, Fille de la Montagne, tes pieds
leur accordent la grâce sous la forme de tes ongles et de leur lumière.

Narayana Bhatta de Melputtur

traduit du sanskrit par Paul Martin-Dubost

Lire la suite

25/02/2021 | Lien permanent

”Puisqu'il est ce silence * prose pour Henri Meschonnic”, de Jacques Ancet, éd. Lettres Vives, mars 2010, 64 pages, 12 €

Rappelons que Henri Meschonnic (qui vivait en Seine-et-Marne) a écrit l'éditorial du n° 38 de Diérèse (octobre 2007), intitulé "C'est le poème..." ; et a confié des poèmes à la revue (dans ses numéros 38 et 45).

* * *

On l'entend. Il parle. Dans le silence. Puisqu'il est ce silence. Sans lèvres, il parle. C'est comme un bruit d'eau, un courant sous les mots. Qu'il dise critique, corps, arbre, rythme, poème, c'est le même mouvement toujours qui les emporte, le même vent - air ou eau, c'est pareil. Et c'est ce qui, avec lui, emporte vers ce qu'on ne voit pas mais qu'on entend partout. Et qu'on répète sans savoir. Avec, dans la bouche, ce souffle qu'on croit avoir - et c'est le sien.


Dans la beauté, toujours. Les arbres qui font la roue, les champs qui étincellent. Dans ce printemps qu'on essaye de garder pour lui. Dans l'espace et le temps des corps. Dans tout ce qui s'appelle vivre - le petit vent, les feuilles qui grésillent, les cris d'oiseaux. Dans le rien du jour, c'est lui, on le sait bien. Parce qu'on le voit, parce qu'on l'entend et qu'il est fait de ce regard, de cette écoute. Dans l'impossible retour, dans l'impossible demain, juste là, au bord, sur le fil du présent, il sourit, il vacille, il sourit.


Jacques Ancet

Lire la suite

10/01/2021 | Lien permanent

”Poteaux d'angle”, de Henri Michaux, éditions Gallimard, 8 janvier 1981, 94 pages, 13,90 €

Un livre majeur de Henri Michaux, qui s'est écrit en l'espace de 10 ans, chez 3 éditeurs successifs (éditions de l'Herne, 29 janvier 1971, 38 pages ; Fata Morgana, 6 octobre 1978, 76 pages ; Gallimard, 8 janvier 1981, 94 pages). L'un de mes livres de référence, j'y puise les ressources nécessaires quand ce que charrie à l'envi ce siècle vingt-et-unième m'exaspère "un peu" trop. A ses côtés, j'ai logé Coups d'arrêt, paru au Collet de buffle le 31 octobre 1975, une plaquette de 16 pages agrafées, à la couverture rouille clair ; l'électricité statique qui s'en dégage est si vive que je le range toujours (après de multiples lectures) à la même place, non sans quelque soulagement.
... Ce qu'a écrit à Michaux Robert Valençay le 23 juin 1971, après la première publication de Poteaux d'angle, mérite ici d'être cité, car ce n'est pas de pure forme, comme chez certains gens-de-lettres :
"Les poteaux sont bien là, certes. Mais les lignes d'angle, à l'intersection desquels ils sont fichés n'en sont pas moins perceptibles, aussi bien dans le domaine auditif que visuel. Et elles évoquent soudain pour moi cette sorte de bataille de traits que jadis se livrèrent Apelle et Protogène.

Vous avez su tracer ici, sur le ou les traits que nous proposent tant de philosophies douteuses, une ligne, plus déliée encore, une ligne qui fulgure à froid pour ne garder que l'essentielle pureté.
Vue sous un fort grossissement, cette ligne est une veine à nu de vif-argent qui remonte impassiblement, au milieu du fleuve, le courant vain des scories qui l'entourent.
Mais ne serait-ce pas là le mercure philosophal ?" (Henri Michaux, Œuvres complètes, La Pléiade, tome 3, p.1729).

Voici :

Communiquer ? Toi aussi tu voudrais communiquer ?
Communiquer quoi ? tes remblais ? - la même erreur toujours. Vos remblais les uns les autres ?
Tu n'es pas encore assez intime avec toi, malheureux, pour avoir à communiquer.

Nouvelles de la planète des agités : avec un fil à la patte, ils filent vers la lune, avec mille fils plutôt, ils y sont, ils alunissent et déjà songent à plus loin, plus loin, à des milliers des milliers de fois plus loin, attirés par le désir nouveau qui n'aura plus de fin, dans un ciel de plus en plus élargi. Cependant sans s'arrêter, des masses immenses dans les espaces tournent à toute vitesse, s'écartent, se fuient, s'attirent, s'équilibrent, orbitent, muent, géants de matière au paroxysme, jusqu'à explosion, jusqu'à implosion, luttant, enragés d'existence, l'existence pour l'existence, pour pendant des milliards d'années continuer à exister, étoiles de toute sorte et galaxies, elles aussi entraînées à exister.
Mais pourquoi donc ? Pourquoi ?

Suicide en satellite.
Celui qui repassera sur cette orbite entendra d'étranges sons : sur des millions de kilomètres d'espace sans personne, un cosmonaute fantôme, sa préoccupation inapaisée, frappe perpétuellement un dernier message qu'on ne s'explique pas.


Henri Michaux

Lire la suite

30/07/2021 | Lien permanent

”Labyrinthes”, Henri Michaux, éditions R.J. Godet, 30/4/1944, 60 pages, avec 13 dessins originaux de l'auteur tirés en v

La lettre du dessinateur *


Quand je regarde le papier blanc, écrit-il, je vois courir au loin un homme épouvanté. De quoi épouvanté ? Je ne sais, et aussi le rite ridicule d'hommes qui tournent en rond.
Puis viennent d'autres hommes (toujours à l'extrême bout du papier) en quantités innombrables, une foule non pour un tableau mais pour une époque. Ces hommes sont maigres et grands.
La santé ne m'a pas prodigué des excès. Je n'en prodigue pas aux autres. Voilà ce qu'on pourrait dire.
Mais pour ce qui est de la multitude, elle est prodiguée. Seul un vieillard au faîte d'une longue vie en vit passer autant.
Ah ! si je pouvais les réunir en un seul tableau ! Il y aurait des gens haletants à le regarder tant il grouillerait de vie.
On s'arrêterait et l'on dirait émerveillé : voilà, cette fois nous avons vu une vraie foule passer !
Mais ils passent et je ne puis les arrêter ni les tenir groupés. Les jambes de l'un effacent l'ombre du précédent. Pourtant chacun, je le vois, a comme un dépôt.
Enfin, de rage de ne pouvoir le retenir, je me jette furieux sur le papier et le massacre de ratures jusqu'à ce qu'il sorte une horrible figure désolée qui en cent toiles et en dix ans a fini par me faire reconnaître pour peintre.
Mais je ne suis pas dupe. Dans les pleurs et la rage, je rejette loin de moi cette maudite usurpatrice, et l'art qui se dérobe m'emplit de son souvenir décevant et amer.

Henri Michaux

____________

* H. Michaux intitulera in fine ce texte, "La page blanche", Cahiers de l'Herne, 8/2/1983

MICHAUX 15.jpg

Henri Michaux, Foules

Lire la suite

07/02/2021 | Lien permanent

Le dernier livre du vivant d'Henri Michaux : ”Avec l'obstacle”, éditions L'Ire des vents, 17 août 1984, 50 exemplaires à

Curieusement, ce livre n'apparaît pas dans La Pléiade (tome 3). Et pourtant il a bien existé ! Mais au juste, quelle en est l'origine ?
Henri Michaux s'est intéressé jusqu'au bout au monde des revues, qui constituaient pour lui un terrain d'essai avant la publication en livre. C'est dans les toutes dernières semaines de sa vie qu'il se tourne vers la revue "Nulle part", une publication dirigée par Jean-Louis Clavé, Bernard Noël, Serge Sautreau et André Velter (1983-1986, 7 numéros parus).
En octobre 1984, dans son numéro 4, "Nulle part" publie un ensemble de poèmes de Michaux intitulé "Postures privilégiées" (signalons que l'illustration de couverture de cette revue, du n° 3 au dernier, était de l'auteur de Plume).

Ces textes ont ensuite été repris sans modification dans Avec l'obstacle, recueil édité par l'Ire des vents : en voici un, saisi plus bas. Post-mortem, les éditions Gallimard publieront ces textes regroupés sous le titre "Postures", en fin de volume, dans Déplacements, dégagements (23 janvier 1985) - ouvrage présenté parfois comme son dernier livre (sic). Pour rappel, le poète s'est éteint le 19 octobre 1984.

En ce jour, une pensée particulière pour Bernard Noël, un auteur de "Diérèse", entre la vie et la mort.

*

Fumée

La fumée qui sort de la maison étroite
comme elle s'étire, comme elle s'élève
en bourrasques, en tourbillons
et puis toute droite


irrattrapable


Libérée du poids de la Terre
des remontrances de la Terre,
des réseaux


Là où les têtes commandantes n'ont plus accès


Maison d'en bas, comme si elle n'était pas
Fumée oublie
Les proches, Qui est proche ?


Henri Michaux

Lire la suite

27/02/2021 | Lien permanent

Jean-Claude Pirotte (1939-2014) et les Lettres du Cabardès

Françoise R. écrit, à propos de Jean-Claude P. :

"Pleine de tristesse, depuis votre message de dimanche sur le blog, je veux juste dire la peine d'une lectrice lointaine et inconnue de Jean-Claude Pirotte. Ses livres resteront sur l'étagère, tout près de ceux d'André Dhôtel, les Aimés. Sa voix accompagne depuis tant d'années mes saisons ! Mais je sais aussi que, comme la petite boîte à musique de l'enfance, ses poèmes feront encore et encore danser les heures boiteuses. Merci et toutes mes pensées à ses proches. "

* * *

Dans le courrier qui suit, en date du 16 septembre 2008, J-C P. se plaint de la fin annoncée de cette belle réalisation que furent les Lettres du Cabardès, il en donne la raison précise. Les poèmes qu'il envoyait à Diérèse étaient manuscrits, écrits au stylo-plume noir.

 

Quant à son allusion aux lettres de Henri Thomas, il s'agit de celles publiées in Diérèse 40 (printemps 2008), inédites, adressées dans les tout derniers mois de sa vie au poète quimperlais Gérard Le Gouic. Jean-Claude, qui aimait plus que tout et pour des raisons que l'on aura devinées, Le Migrateur, de Henri Thomas, pensait qu'un Cahier de la NRF, a minima, pouvait mettre l'accent sur l’œuvre épistolaire de l'auteur des Maisons brûlées. Depuis, un intéressant Choix de lettres, 1923-1993 a bien été publié par les éd. Gallimard, et ce n'est que justice. DM

 

 

PIROTTE 6.jpg

 

 

Lire la suite

26/05/2017 | Lien permanent

”Autres séjours”, de Jean-Claude Pirotte, éd. Le Temps qu'il fait, octobre 2010, 200 p., 18 €

JCP 16.jpg

le travail sous la lucarne
est une forme d'oubli


le peu de neige qui semble
doucement venir de la lune
touche la vitre et se transforme
en traînées de larmes le ciel


est plus sombre aussi plus profond
comme l'amer regret des siècles

*


le Vosgien (nouvel insulaire)
Henri Thomas devant la mer


je le vois en rêve sourire
aux nuages aux goélands


aux rochers où l'eau se déchire
à la brume que troue le vent


je le vois c'est un souvenir
que j'invente et puis j'imagine


en écoutant la rumeur vive
des marées d'hiver qu'il me parle
d'avenir sous le soleil pâle

*


il faut inventer le chemin
qui mène aux lointains parages


des pas de l'enfant disparu
le sable a gardé la trace


et c'est là le miracle
où allait-il que savait-il


de ces lieux imprévus
où le soleil se couche


et comment fit-il pour survivre
et grandir entre les dunes mauves

 

Jean-Claude Pirotte

Lire la suite

23/04/2020 | Lien permanent

Diérèse 68 - en préparation : Gérard Le Gouic

L'auteur de "Sentiments obscurs" (éd. Coop Breizh, 1996, avec un avant-dire de Henri Thomas) fera paraître dans la prochaine livraison des poèmes inédits, dont :

 

PRIÈRE


          Qu’est-ce cela
          pour vous qui pouvez tout ?


          Quelques mots, quelques sons,
          une musique plus fluette
          que celle du pinson,

          une poignée de sable
          que vous répandrez sur ma peau,
          personne ne le remarquera
          même pas la mouche ou le puceron.

          Ce sera un secret
          entre moi qui ne peut rien
          et vous qui pouvez tout...


                                       Gérard Le Gouic

Lire la suite

26/05/2016 | Lien permanent

”Traverses”, Jean-Claude Pirotte, éd. du Cherche midi, 2017

Le 28 août 2010

     ... Je n'avais pas la vocation d'un déménageur. Et ma vie, on peut le dire, s'est passée à déménager*. Or, on ne recommence jamais à "zéro". Ce que l'on transporte, c'est soi-même, avec les vieilles tares, les illusions de plus en plus délavées, les sourdes maladies de l'âme et les violentes affections du corps. On doit cependant laisser des morceaux de soi un peu partout, des bouts de mémoire à jamais disparus.
     "Épouse et n'épouse pas ta maison." conseillait René Char.


Jean-Claude Pirotte

 

* Dans le numéro 44 de Diérèse qui lui a été consacré, Jean-Claude Pirotte nous informait de ses déménagements de ville en ville, pays en pays, d'abord une réaction de fuite, "une cavale clandestine et voyageuse (Val d'Aoste, Catalogne, Bourgogne, Périgord, Suisse, Rethel, Paris, la Haute-Marne, et tous les vignobles aimés)"... Il a confié des extraits de ses Carnets, plus tard publiés en livre, à la revue. Cet appétit d'écrire qui ne l'a jamais quitté, ancré dans une "vie précaire et lumineuse", ses déboires assumés, bon an, mal an, sans jamais renier ses convictions, ses auteurs de référence, comme Henri Thomas et son fameux "Migrateur". Son mérite et sa force d'âme. La maladie, qui le rongeait de l'intérieur, avant que le dernier souffle n'emporte cet "enfant qui rame avec les mains vers le néant" ("Goût de cendre", page 83, éditions Thone, 1963) et qu'un soleil majestueux ne le capte au passage de l'autre côté du miroir. DM

Lire la suite

13/05/2018 | Lien permanent

Page : 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12