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05/10/2021

"Origines, la nostalgie des commencements", Trinh Xuan Thuan, éditions Fayard, 22/10/2003, 392 p., 60,80 €

Chronique d’une mort annoncée, celle, dans un ultime sursaut, de la fin du Soleil


   Comme les éphémères, les étoiles meurent un jour, les chroniques s’arrêtent et les univers s’éteignent. Comme le remarque fort à propos l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan dans son livre, Origines, la nostalgie des commencements (Fayard), le Soleil ne fait pas exception à la règle voulant que toute chose ait une fin : "Son futur nous concerne au plus haut point puisque c’est lui qui entretient la vie sur terre. Notre survie dépend de la sienne. Que va-t-il arriver au Soleil?" 
   Notre étoile se trouve à peu près au milieu de son existence et consomme tranquillement son hydrogène dans une réaction continue de fusion nucléaire. Mais viendra un jour, dans environ 4,5 milliards d’années, où le Soleil ayant épuisé le carburant contenu dans son cœur commencera à se contracter. Cela échauffera les couches supérieures d’hydrogène, lesquelles démarreront à leur tour la réaction de fusion et s’embraseront.
   Ainsi que le décrit Trinh Xuan Thuan, "ce regain d’énergie fera enfler considérablement les couches extérieures du Soleil, lui faisant atteindre environ cent fois sa taille actuelle (…) Le Soleil deviendra une géante rouge et engloutira Mercure et Vénus dans son enveloppe brûlante. Vus de la terre, les trois quarts du ciel vireront au rouge. La température sur Terre deviendra intenable. Les mers s’évaporeront, les forêts partiront en fumée. Pour échapper aux brûlants tentacules de la géante rouge, nos arrière-arrière-petits enfants devront migrer vers l’extrême bord du système solaire, sur Pluton."
   Ce ne sera que le début de l’exode. Une fois que notre étoile aura dévoré ses réserves d’hydrogène, elle s’attaquera à son cœur d’hélium, qui se transformera en cœur de carbone. Et lorsque les réservoirs d’hydrogène et d’hélium seront à sec, le Soleil, insuffisamment massif pour mettre à feu son carbone, s’éteindra et s’effondrera sur lui-même. Il deviendra une naine blanche de la taille de la Terre. À supposer qu’ils aient survécu jusque-là, nos lointains descendants auront anticipé cette mort et trouvé non loin de nous une étoile jeune accompagnée d’une planète habitable.
   On pourrait se contenter de cette belle histoire de phénix stellaire, imaginer une série perpétuelle de recommencements et se dire que le temps n’a pas de fin. Mais fin il y a, et elle est sombre. Les cosmologistes se sont longtemps demandé quel sort était réservé à l’Univers. Celui-ci allait-il se rétracter sur lui-même et, tout comme il a commencé par le Big Bang, se terminerait-il par un Big Crunch ? Resterait-il plus ou moins stable ou, troisième solution, connaîtrait-il une expansion accélérée ? La réponse est désormais connue : une mystérieuse énergie noire domine l’Univers et, agissant comme une sorte d’anti-gravité, éloigne les galaxies les unes des autres dans un mouvement général d’expansion accélérée.

L’appel du vide

   Pendant encore très longtemps, les conséquences seront nulles pour nos virtuels héritiers. Mais il faut pas se leurrer, l’énergie du vide finira par éparpiller les galaxies à des distances si importantes que, dans quelques dizaines de milliards d’années, nous n’en verrons plus aucune. Notre propre Voie lactée - qui aura entre-temps fusionné avec la galaxie d’Andromède et sans doute d’autres représentants de la gent galactique -, commencera elle-même à se diluer dans le grand vide. Les immenses nuages de gaz et de poussières qui, en se contractant, donnent naissance aux étoiles et à leurs cortèges de planètes se rassembleront de plus en plus difficilement, tout comme les enfants d’une même école qui, après s’être longtemps côtoyés, finissent par se perdre de vue.
   Les étoiles en mourant, n’ensemenceront plus leur voisinage, ne pourront plus jouer aux phénix. Leur énergie sera perdue pour toujours, et la matière se dispersera comme cendres soufflées au vent. Seuls subsisteront, pour un temps, les naines brunes, ces avortons d’étoiles trop peu massifs pour allumer en eux le feu nucléaire, les cadavres stellaires - naines blanches, étoiles à neutrons - et les trous noirs.
   Mais même ces derniers, qui sont pourtant les plus denses de la nature, ne résisteront pas à cet appel du vide. Car, comme l’a démontré l’astrophysicien britannique Stephen Hawking, les trous noirs rayonnent de manière infime. Placés dans un environnement dont ils ne peuvent tirer substance pour se nourrir, ils finiront par s’évaporer.
   L’univers aura alors 10100 (soit 1 suivi de 100 zéros) années d’âge et ressemblera à un néant noir parsemé de-ci de-là de particules élémentaires. Évidemment, on peut chipoter, discuter, ergoter, affirmer que, tant que la matière existe, on n’a pas le droit de parler de néant et d’euthanasier le temps. On peut aussi être moins à cheval sur les mots, ne pas oublier que le temps est une notion humaine ou tout au moins biologique, et se dire que le cosmos ainsi que les chroniques astronomiques ont droit à une belle mort.

Pierre Barthélémy

04:07 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

04/10/2021

"Le masque intérieur", de Jean-Marie Gibbal, Pierre Jean Oswald éditeur, mai 1973, 96 pages, 12,30 F

Un poète à part, discret et très peu médiatisé, né à Grenoble en 1938, ethnologue, critique d'art, qui a vécu et travaillé en Côte d'Ivoire, a officié au Mali et qui "pour le reste" habitait Paris par nécessité. On citera de lui  : Les génies du Fleuve, Presses de la Renaissance (1988) et son remarquable Georges Perros, paru chez Plon en 1991. Il s'est éteint en février 1993, à Grenoble.

*

pour Evane


Quel que soit l'endroit où tu te trouveras, ce sera l'est et l'ouest à la fois

         Le matin et le soir confondus

         Les confins se toucheront

Quel que soit l'endroit où tu te trouveras ce sera toujours le plus à l'ouest

         Dans la profusion du couchant océan
Pourtant les cristallins lichens de l'aube estomperont les montagnes brumeuses.
Des vapeurs monteront des forêts immobiles
Et tu les verras de ton arène sèche encerclée par les ombres fauves des falaises.

         Dans le matin et le soir confondus

         Alors

         Tu seras arrivé
.

*

L'automne cœur de chêne éclaté

Somptueuse maladie du feuillage

Entonne ses cuivres graves et rauques

La nuit s'écarte du jour

Et nous recherchons autour d'un feu de bois

Le doux soleil des raisins mûrs des vallées sèches et des pierres dorées

 

L'étang se noircit au ventre des nuages

Le brochet flèche d'eau s'accroche au vif meurtrier

Le ciel s'emplit alors d'immenses oiseaux invisibles

Les arbres frémissent aux palpitations de leurs ailes et se dénudent sur leur passage

Jean-Marie Gibbal

14:02 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

01/10/2021

"L'arbre le temps", de Roger Giroux, éd. Mercure de France, 30/4/1964, 104 pages

Ayant pris possession de ses ombres, le poète occupe un espace démesuré : la transparence. Est-ce une tragique état, ou le chant de l'oiseau qui est au centre de la croix ? Connaissant du moins la hauteur du souffle, est-il pour lui d'autre parole que mitoyenne ?
Au carrefour du sang et de la lumière, la phrase serait or véritable.

Poussière d'être, affleurement de paroles sensibles, feuillages qui bougent dans l'eau de l'âme, pulsation de maintes minutes... et je reste sans voix dans la fine prison des sens.
Être cela, multiple, à la pointe qui tremble, frissonne et tremble dans l'intervalle du sang et de la lumière, à la naissance de l'amour.

Rien n'est jamais dit. Et, toujours, dire ce rien. Perpétuelle naissance du poète. Et va-t-il s'arracher le visage ? Car c'est plus loin qu'il prétend voir, antérieurement à tout espace. Et qui l'emportera, d'un hurlement qui l'étrangle, ou de la joie, qu'il ne peut pas communiquer ?
Nulle fable.

De l'un à l'autre silence, en égale question, le poème s'équivoque.

 

Roger Giroux

13:36 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)