09/06/2014
Marché de la Poésie, Daniel Martinez
Sans oublier de me présenter à présent, il est temps je crois :
Daniel Martinez réside depuis l’été 1975 à Ozoir-la-Ferrière, en Seine et Marne.
Des publications en revues :Les Cahiers du Schibboleth, La Nouvelle Tour de Feu, Phréatique, Linea, Le Cri d’os, Arpa, Thauma, L’Indicible frontière, Pphoo, La Passe, Les Citadelles, L’Arbre à paroles, Verso, Concerto pour marées et silence, Voix d’encre, Revue Alsacienne de Littérature…
Je dirige la revue Diérèse, à périodicité trimestrielle, depuis mars 1998, 62 numéros parus à ce jour, comité de rédaction partagé avec Isabelle Lévesque depuis le n°52/53. Je dirige aussi les éditions Les Deux-Siciles, depuis septembre 1998 (42 titres parus à ce jour).
J'ai publié 12 recueils de poésie, dont : N'être qu'une fois (éditions du Contentieux, sept. 2001), Le Bestiaire de Vénus, en regard de collages de Jacques Coly (éd. Le Petit Véhicule, 2003), Le Système de Véga de la lyre (éd. Le Nerprun solaire, 2005) ; en 2007, j'ai illustré Feeders au regard de poèmes de Jacques Coly (éd. Le Petit Véhicule) et publié Les mains du songe (éd. Le Nerprun solaire) ; en 2011 et 2012 ont été publiés aux Deux-Siciles : Diadème du regard et Terre entière. En 2013 : La croisée des saisons et Kakusha (éd. du Contentieux).
Si vous voulez me lire un peu, voici :
Sébastien Stoskopff, Corbeille de verres, huile sur toile, 1644
Corbeille de verres
L’air s’est fait des plus légers, la rampe du songe au loin
laisse perler des gouttelettes qui concentrent
des particules d’étoiles, invisibles.
De l’une à l’autre devenues relais lumineux
sur le chemin de la mémoire :
à la droite d’un gobelet d’orfèvrerie
ici renversé, brillant et glacé,
un römer arbore la tristesse des dieux,
et la lente maturation du vin s’y lit
dans ce qu’approche la main, ouverte.
Sur le côté gauche du tableau,
qu’ont-ils donc perdu de leur histoire
les fragments dispersés du verre
dont les soies du pinceau touchent la froide braise ?
L’idée de l’éternité se conjugue avec
une vanité sous-jacente, son à-propos :
telle une peau froissée en regard
des lisses reliefs des deux coupes,
à chaque extrémité de la corbeille
plane l’air bleu nuit, empli d’ailleurs.
Une image de la paix, cette gloire des reflets solaires
ou le grènetis de l’écume qui constelle l’ensemble
afin de mieux dévoiler la chrysalide, œuvre accomplie ?
Assurément, ce serait crime
que de déranger le bel ordre proposé,
ce serait sacrilège que de déséquilibrer
l’un des plateaux de la balance
dont le fléau, un hanap en grappe de raisin
porte à son extrême le rayonnement second des choses
élargissant le champ du fantasme
puis celui de la toile toute entière, un défilé de masques
s’ajustant les uns aux autres, à présent figés,
enchevêtrés, icônes objectives de la (toute) petite mort.
Daniel M.
* *
Quaderno di viaggio
«Je ne pense pas, je note»
Pierre Reverdy
Gîte d’étape à Nefta, dans le grand sud tunisien
(Tappa a Nefta, nell’estremo sud tunisino)
Tout se joue au premier regard
entre les mots de peu
et les couleurs verticales
formes brouillées mises à nu
rues flottantes que zèbrent de blanc
les pointes des roches presque translucides
à deux pas de la frontière algérienne
deux femmes en conversation
dans l’écartement des volets
et sous les paroles anodines
muette convergence des intentions
Tutto si decide al primo sguardo
tra parole di poco conto
e colori verticali
forme confuse messe a nudo
strade fluttuanti striate di bianco
dalle creste delle rocce quasi traslucide
a due passi dalla frontiera algerina
due donne conversano
nell’interstizio delle persiane
e dietro le chiacchiere futili
una muta convergenza d’intenti
*
Naseaux frottés contre l’échine
un mulet qui voudrait semble-t-il
happer l’autre côté de l’air
laisse naître des images
comme sur son poitrail à l’endroit
où s’use le poil paraît
une sorte de lait bleu cendré.
L’œil vivant du monde
se loge dans le crochet de grue aperçu
depuis l’espace confiné de la pièce
tout attention
Sfregando le frogie contro la schiena
un mulo che sembra voglia
afferrare l’altra parte dell’aria
lascia nascere delle immagini
al modo in cui sul suo petto nel punto
dove si consuma il pelo compare
una specie di latte blu cenere.
L’occhio vivente del mondo
s’infila nel gancio della gru intravisto
dallo spazio limitato della stanza
ben attento
*
Il est encore cette fenêtre de chant
et de rêves égarés
comme l’heure nue sous le plafond haut
les odeurs les froissements
l’infini contre soi.
A même la brique ocrée
Une toile piquée là sans châssis
fixe anonyme le premier quartier de la lune
pris dans l’acacia noir
Ancora un canto dalla finestra
e sogni smarriti
come l’ora nuda sotto il soffitto alto
odori fruscii
l’infinito contro di sé.
Proprio su una mattonella ocra.
Una tela appoggiata lì senza supporto
fissa anonima il primo quarto di luna
impigliato nell’acacia nera
*
Daniel Martinez
traduit par Francesco Marotta
22:46 Publié dans Auteurs, Revue | Lien permanent | Commentaires (0)
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