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05/12/2014

Brésil : "Les Tambours noirs" de Josué Montello

Venus du coeur de l'Afrique, les "tambours noirs" rythment une part de l'histoire brésilienne. La nuit dans laquelle ils résonnent n'est pas lointaine, abstraite ou mythique. Elle est ce tout proche passé qui touche et hante le Brésil moderne, qui est comme son enfance.

Aussi fort, aussi religieusement que les cloches, ils appellent, ces tambours noirs, le lent et douloureux cortège des millions d'esclaves africains qui ont fait vivre le Brésil jusqu'à la fin du XIXe siècle - l'esclavage ne fut aboli qu'en 1888. Ils ont contribué à former l'identité plurielle, riche et complexe de la société brésilienne.

Le roman de Josué Montello ramasse et symbolise ce passé ; il le convoque dans l'existence de Damien, la très belle figure centrale du livre, un Noir octogénaire, ancien esclave. Son existence est à la fois derrière lui, dans sa mémoire, et devant lui, dans la personne de cet arrière-arrière-petit-fils dont il part faire la connaissance d'un bout de la ville - Sao-Luis-de-Maranhao, au nord du pays, à l'autre.

La vie de Damien est à l'image de celle des esclaves, ses parents, ses frères : une lutte pour la liberté. L'affranchissement n'a pas été que le premier pas. Il faut ensuite découvrir, à travers les humiliations, les ambiguïtés aussi, le chemin de cette liberté, conquérir ce qu'on ne vous a que concédé.

Cet enfant que Damien rencontre au terme de son périple symbolique n'est "pas noir, mais tout brun, comme un bon Brésilien". la remarque n'est pas seulement cocasse, elle révèle une vérité, récuse le simplisme des bons sentiments, dessine l'avenir : "En même temps que se diluait ainsi, d'une génération à l'autre, le sang noir dont lui était si fier, s'estompait le ressentiment de l'esclavage."

Diplomate, écrivain reconnu, spécialiste de Stendhal, Josué Montello a su contourner dans ce grand et généreux roman les schémas du récit historique, social ou mythologique. Mêlant savamment ces modèles sans subir leur contrainte, il a construit un roman réellement moderne, qui se lit comme un grand roman du dix-neuvième siècle.

                                                                                       Francis Marmande

Les tambours noirs (Os Tambores de Sao luis), de Josué Montello, traduit du portugais (Brésil) par Jacques Thiériot, Marie-Pierre Mazeas et Monique Le Moing, éd. Flammarion, 516 pages.

 

14:38 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

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