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11/05/2017

De la maladresse !

Cette réponse de Philippe Jaccottet m'amuse un peu car comment nier que la bonne poésie déborde toujours le langage qui ne suffira jamais à la circonscrire. C'est là même où le courant dit "objectiviste" a échoué, car le réel ne présente d'intérêt que lorsqu'il est redimensionné. Pourquoi ?, simplement parce que la poésie est un art et non la copie fidèle de l'existant : lorsque Bonnard peint le Grand nu bleu par exemple, une troisième jambe apparaît au premier plan, attachée à rien, et qui ne pourrait appartenir qu'à celui ou celle qui regarderait la jeune femme s'essuyant avant de la peindre. Il y a aussi le chien-coussin-étoffe brun rouille de La Veillée et encore le fantôme bleu azur d'un dossier de chaise absolument illogique dans le coin gauche du Café. Bonnard, comme tout bon poète, semble par là céder à une sorte de vertige mal explicable et, y cédant, entraîne le spectateur/ le lecteur avec lui.
L'explication matérialiste de notre auteur de La Pléiade est étonnamment pauvre, car le Beau est non seulement indémontrable mais encore les seuls stimuli ne suffisent à l'expliquer par la négative. Bien plutôt, il passe par un vecteur, le scripteur, qui délivre le message sans en être le maître, simplement l'exécutant. Sans cet intermédiaire obligé, la poésie n'existerait pas. C'est dire la dimension d'abord humaine du poème, transfigurée par le génie de quelques-uns - entendons-nous bien, ils ne sont pas légion. Pour illustrer mon propos, relisez je vous prie "Aube", de Rimbaud, l'un des plus grands moments de poésie que je connaisse : "Je ris au wasserfall blond qui s’échevela à travers les sapins : à la cime argentée je reconnus la déesse."... DM

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