10/01/2018
Maurice Genevoix (1890-1980)
Il est un livre que je tiens en estime, dans ma bibliothèque : c'est Forêt voisine de Maurice Genevoix, édité par Flammarion à la fin de l'année 1952. L'auteur/le poète nous y parle de bouleaux, de pins, des eaux forestières, du peuple des ailes... J'ai choisi pour vous un passage de ses "Routes de forêt" :
Elle est fauve au soleil, et par endroits lavée de coulées roses. Plus chaude aux yeux que la grand'route noircie, elle nous surprend pourtant de sa fraîcheur un peu humide. Il n'y a plus la moindre rosée dans l'herbe ; tout le long des fossés la bruyère de l'été dernier, fanée, roussie, fait sous les pas un cliquetis sec. Mais un luisant mouillé avive la tranche des silex, les pointes d'herbe et les talles de mousse. Tout ce qui touche nos yeux paraît ainsi mouillé, gonflé d'eau pure ; et quand nous fermons nos paupières, cette fraîcheur lustrale semble couler de nos cils même.
A droite, à gauche, c'est un taillis de faible hauteur, des charmes dont l'écorce est mouchetée d'un lichen sombre, - brun profond, vert noir, mordoré. Ces plaques ont la dureté aride des choses vieilles, comme la bruyère aux clochettes mortes qui s'effritent et tombent en poussière aussitôt que nos doigts les effleurent. Tout le terreau sous le couvert apparaît d'un gris terne, un gris d'usure et d'abandon. Tapissé de feuilles consumées, petites grilles de nervures à l'aspect minéral, il s'emplit dans les creux d'une sorte de bourre stérile : et tout cela nous heurte de la même ingrate sensation, d'aridité cliquetante et poudreuse...
Maurice Genevoix
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