01/07/2020
"Carnet d'un buveur de ciel", de Dominique Sampiero, éditions Lettres Vives, octobre 2007, 96 p., 13 €
Quand les mots se rétractent jusqu'à l'os, se taire fait craquer les gencives, les phalanges, et c'est une terre noire, plus sombre que la nuit, un trou béant dans la présence où tombent les regards les uns après les autres comme des feuilles mortes.
Alors les regards m'évitent, les silhouettes croisées ont peur de tomber dans cette absence, ce ciel vide qui plane au fond de moi, ce ciel sans bord, infini, cette pure présence où je m'avale, dévale, je passe à travers, mes doigts se crispent, puis je respire, je relâche, et je plane, à force, dans cette chute sans fond avec un visage de feuille morte.
Je n'existe que par ressemblance. Je suis présent par petits bouts, par morceaux. De grandes bourrasques roulent leurs rires ou leurs larmes et me dictent des pensées d'oiseaux, d'enfants enivrés par le tabac. Au réveil, me reste l'impression d'être passé à côté d'un ami sans le reconnaître. Quelque chose comme un rêve qu'on a oublié d'écrire. Moi, tout simplement.
Dominique Sampiero
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