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18/08/2021

"L'Ordre du jour" : Roger Munier, éditions Fata Morgana, 13/2/1982, 56 pages, 500 exemplaires

A travers la croisée, la nuit était bleu tendre, par une demi-lune très claire, dans un ciel serein. Réveillé bien avant l'aube, je gardai les yeux ouverts jusqu'au matin. Et cette nuit, avec qui je fus comme avec un être réel, m'accompagna tout le jour de sa présence bleue, où l'astre nu dérivait calmement.


La nuit ne se laisse pas connaître, étant la nuit, mais se laisse respirer.


Toutes les innombrables couleurs pour déployer, sans l'égaler jamais, la seule opulence nocturne.


Chant du coucou ; deux notes seulement, mais limpides, et tout est dans leur écart où tient l'espace frais, la profondeur des bois. 


La lumière autant cache les ténèbres. Peut-être les abrite en soi.


La vie passe à côté, toujours à côté, comme un souffle brûlant.


Rien de précis n'attire l'attention. Rien ne parle. Tout est, mais rien ne parle. Même l'hirondelle dans son cri ne parle. L'être est silence.


Ecrire, c'est traduire comme on peut dans sa langue un original inconnu.


Ecrire à la manière dont tout se fait : comme une perte.


La poésie, comme un élan qui soulève les mots presque purement comme mots, hors même leur sens : une houle. Cette seule houle déjà rejoint on ne sait quelle touffeur dorée dans les choses, quel îlot bienheureux...


Le poème doit précéder son sens.


Le sens est en exode, à travers tous les sens.


Tout est réel et tout est songe. En même temps.


Ne laisse pas parler ce qui voudrait parler aujourd'hui. Il est des voix qu'il vaut mieux taire, quand elles n'ont pas de chant.


Qu'est-ce que cette allégresse qui nous vient, quand nous sommes parvenus à nommer ? Quand nous avons trouvé ne fût-ce que le mot juste ? Qui nous récompense alors et de quoi ?


La fleur comprend le monde en fleur et l'oiseau en oiseau. Pourquoi l'homme ne peut-il le comprendre en homme ? Car il veut plus : il veut le comprendre...


Je respire le parfum de la rose et c'est le parfum de quelque chose qui est comme la rose - non la rose.


Roger Munier

13:42 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

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