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12/09/2017

"Graziella", d'Alphonse de Lamartine (1852)

Il est un petit livre de Lamartine que je chéris plus particulièrement, le demi-maroquin de la couverture passé laisse paraître encore en filigrane de petits filets d'or, il s'agit de Graziella, réplique parfaite de l'édition originale, opus publié par la librairie Alphonse Lemerre, 23-33 passage Choiseul à Paris. Il a autant voyagé que l'auteur, entre mes mains toujours. Pour vous ce

Chapitre XVI

 

     Quelquefois Graziella, me voyant plus longtemps enfermé et plus silencieux qu'à l'ordinaire, entrait furtivement dans ma chambre pour m'arracher à mes lectures obstinées ou à mes occupations. Elle s'avançait sans bruit derrière ma chaise, elle se levait sur la pointe des pieds pour regarder par-dessus mes épaules, sans le comprendre, ce que je lisais ou ce que j'écrivais ; puis, par un mouvement subit, elle m'enlevait le livre ou m'arrachait la plume des doigts en se sauvant. Je la poursuivais sur la terrasse, je me fâchais un peu : elle riait. Je lui pardonnais; mais elle me grondait sérieusement, comme aurait pu faire une mère.
     "Qu'est-ce que dit donc aujourd'hui si longtemps à vos yeux ce livre ? Est-ce que ces lignes noires sur ce vilain vieux papier n'auront jamais fini de vous parler ? Est-ce que vous ne savez pas assez d'histoires pour nous en raconter tous les dimanches et tous les soirs de l'année, comme celle qui m'a tant fait pleurer à Procida ? Et à qui écrivez-vous toute la nuit ces longues lettres que vous jetez le matin au vent de la mer ? Ne voyez-vous pas que vous vous faites mal et que vous êtes tout pâle et tout distrait quand vous avez écrit ou lu si longtemps ? Est-ce qu'il n'est pas plus doux de parler avec moi, qui vous regarde, que de parler des jours entiers avec ces mots ou avec ces ombres qui ne vous écoutent pas ? Dieu ! que n'ai-je donc autant d'esprit que ces feuilles de papier ! Je vous parlerais tout le jour, je vous dirais tout ce que vous me demanderiez, moi, et vous n'auriez pas besoin d'user vos yeux et de brûler toute l'huile de votre lampe." Alors elle me cachait mon livre et mes plumes. Elle m'apportait ma veste et mon bonnet de marin. Elle me forçait de sortir pour me distraire.
     Je lui obéissais en murmurant, mais en l'aimant.


Alphonse de Lamartine

19:39 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0)

11/09/2017

Philippe Geneste parle de Diérèse 70

Copie du blog lisezjeunessepg  :                    

 

Diérèse, poésie & littérature, n°70 printemps-été 2017, 300 p. 15€ (chèque à l’ordre de Daniel Martinez, 8 avenue Hoche 77 330 Ozoir-la-Ferrière – abonnement 45€)

Cette livraison propose, sur trente-sept pages, une anthologie de la poésie de l’Amazonie péruvienne, avec une introduction explicative érudite et un choix de textes présentés. Le même numéro contient des poèmes extraits d’une œuvre plus ample, Variations oulipiennes en enfer, d’Augustin Givord-Bartoli. Ces poèmes sont un petit régal augmentés qu’ils sont de la clé de leur fabrication. Le numéro contient aussi la fin de l’entretien tenu par Bruno Sourdin avec Daniel Abel, un proche d’André et Élisa Breton.


Philippe Geneste

09/09/2017

"Ce qui est seul", de Dominique Labarrière (1948-1991)

Il conviendrait de ne pas parler de "suicide" à propos de la disparition de Dominique Labarrière, mais d'un décès provoqué par un "coma diabétique". Le contexte pourtant (qui ne m'est pas inconnu) donnerait des éléments à... Bref.
Voici un texte de lui qui ne court pas les rues, offert aux lecteurs de ce blog, il l'a écrit en octobre 1985 :

"Ce qui est seul est ce qui est ici et maintenant. "Ici et maintenant" : en aucun cas cette forme vide, abstraite, pauvre à laquelle Hegel assignait la plus basse place dans le cheminement de l'Esprit.
Ici et maintenant qui exige pour être simplement vu une qualité bien particulière de présence au monde, à soi, à l'être.
Cette qualité porte un nom : détachement.
Détachement : non pas rejet et oubli de ce qui m'entoure comme quelque chose de méprisable, comme de l'étant chargé d'être négativement. Mais bien plutôt un refus de tirer de ce qui arrive quelque bénéfice que ce soit à des fins personnelles, pour l"accroissement ou l'enrichissement de la conscience. Si l'on tient à donner des noms, une telle épreuve de l'être, apprendre à voir ce qui arrive ici et maintenant, cet apprentissage peut être nommé poésie."

Dominique Labarrière

 

22:27 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)