29/03/2017
"Vertiges", d'Alain Fabre-Catalan
Vertiges, d’Alain Fabre-Catalan, Cahier du Loup bleu, coll. Les Lieux-Dits. Dessin de Cyril Barrand
Le monde. Nous y sommes et nous n'y sommes pas. Qu'est-ce que nous percevons de notre vie, de nous-mêmes, de ce qui nous entoure ? Vertiges nous fait suivre un chemin, où nous entendons, où nous voyons, où nous sentons ce qui sans cesse se présente et s'éloigne, ce qui nous manque pour que le monde soit monde, et qui pourtant s'offre à nous comme au promeneur émerveillé. Émerveillé ? On pourrait en douter à suivre les jalons disposés au long du chemin, les titres regroupant deux ou trois textes : Ignorance, Soif, Égarement, Promesse, Traversée, Douleur, Éclaircie, Chimère, Ravin, Arrêts, Verticale. C'est en effet que la lumière ne cesse de paraître et de se dérober, c'est que nous sommes toujours à la lisière, où miroitent abîme et éboulis, jour et nuit, pierre et rivière, parole et silence, vie et mort... Et pourtant, à la lecture de Vertiges, à travers un flot de correspondances cosmiques, oui, nous sommes émerveillés par « ce que voient les oiseaux qui passent et repassent inlassablement, au-dessus du pré carré où se dessine un enchevêtrement de stèles renversées, dans la lumière rase où s'accroche la promesse de la nuit », et, comme le poète, nous sondons « le vide dans un surcroît de paroles ». Car c'est bien la poésie et la superbe écriture d'Alain Fabre-Catalan qui nous donne le vertige, « le vertige de la phrase, l'imperceptible clarté qui ne cesse de vivre comme un présage entre les mots » (Égarement). L'appel vient de l'ombre, affirme le poète (Arrêts), et, avec lui, nous l'entendons, nous le suivons, « avant de trébucher sur la dernière marche » (Arrêts). Oui, sans doute, nous restons en ce monde, « dans l'étendue infranchissable » (Verticale), mais « avec l'éclat de l'enfance qui ne s'éteint pas » (Égarement).
Vertiges peut être lu comme une poésie ésotérique, un récit initiatique, une quête intérieure aux multiples images éblouissantes. Et pourtant, en lisant et relisant ce recueil, c'est la clarté qui domine, une sorte d'intelligence de notre propre condition, où nous sentons, nous aussi, « la brûlure de l'éclair qui n'en finit pas » (Verticale).
Olivier Massé
16:28 Publié dans Critiques | Lien permanent | Commentaires (0)
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