18/03/2019
Katherine Mansfield (1888-1923)
C'est l'un des poèmes de la Villa Pauline, traduit par Philippe Blanchon, que je vous donne à lire aujourd'hui. On s'étonnera que cette nouvelliste d'importance n'ait pas trouvé plus d'échos dans le monde des Lettres côté Poésie... Une œuvre poétique courte, très incomplètement traduite en français, cependant Katherine Mansfield n'en demeure pas moins sujet d'émerveillement dans certains de ses poèmes, toujours libres d'esprit, en dehors du temps et des courants. Avec, pour souci principal, une réconciliation par les mots avec le monde environnant (on sait sa vie d'errance, les répercussions du décès de son frère, sans parler de sa tuberculose...), dans des pièces conçues comme "un acte de foi". En 1915, en quête de soleil, elle fait un premier séjour sur la Côte d'Azur. Sanary a été écrit en 1916.
Sanary
Sa petite chambre chaude donnait sur la baie
A travers une palissade roide de palmiers scintillants,
Et là elle s'allongeait dans la chaleur du jour,
Sa tête brune reposée sur ses bras,
Si tranquille, si immobile, elle ne semblait pas
Penser, sentir, ni même rêver.
La chatoyante, aveuglante toile de la mer
Était suspendue dans le ciel, et le soleil araignée,
Avec une cruauté besogneuse et effrayante,
Rampait dans le ciel et filait, filait.
Elle pouvait le voir encore, les yeux clos
Et les petits bateaux pris comme des mouches dans la toile.
Plus bas, au-dessous, dans ces heures paresseuses
Personne ne marchait dans les rues poussiéreuses
Une odeur de mimosa mourant
Flottait dans l'air, douce - trop douce.
Katherine Mansfield
Extrait de Villa Pauline & Autres poèmes, éditions La Nerthe, septembre 2012.
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