26/05/2016
Diérèse 68 - en préparation : Hélène Mohone
Est-il besoin de présenter Hélène Mohone, dont Diérèse publiera un conte inédit, dont voici les premières lignes, plus bas ? Une question embarrassante pour les éditeurs qui, de son vivant, ont refusé en choeur ses manuscrits... Dans le domaine, permettez-moi, je ne crois pas au hasard : il y a bien une logique interne à l'injustice.
La cérémonie
1
La prière à Saint François
Tout change un jour de printemps. Tout y est à rebours. De l’habile marchandage de sexe à l’estocade définitive, au centre de la femme qui va nu-tête dans le soleil pour la grande messe de Notre-Dame du Perpétuel Secours.
Ils n’iront pas danser. Ne reste que le silence familier de la peur… Ou serait-ce la tristesse ?
Pour l’heure, de la femme, il n’est pas question. Il est question de Saint François et de sa grande bienveillance aux animaux. La femme est couchée plus loin, dans l’attente d’un passage qu’ils fixent sans rien dire.
Ce n’est pas la lumière ternie du crépuscule qui parle mieux de ce qui a disparu. La perte vient répondre à l’odeur qui appelle, qui veut dire quelque chose de sauvage et de tendre à la fois. Contre le mur de pierre de la cuisine, dans le chuchotement des voix mêlées, l’odeur a saisi les objets, la nourriture, ses vêtements, sa bouche et ce qui s’y passe. Ses mots ont l’odeur aussi. Alors il se tait. Il éteint et il allume la veilleuse près de lui, juste pour voir son visage paraître et disparaître, et reconnaître, imperceptiblement ce qui, familièrement, le compose de près : son nez, ses yeux et ses lèvres. Apparus et disparus, son nez, ses yeux et ses lèvres et l’odeur carnivore d’un sang noir sur le sable. Les bruits de la foule et ce combat terrible sur la place...
Hélène Mohone
22:50 Publié dans Diérèse 68 | Lien permanent | Commentaires (0)
Diérèse 68 - en préparation : Jean Chatard
En confidence je dirai que le matin suffit au bleu
mais n'allez pas user de douces représailles
pour inventer l'oubli qui nous porte au bonheur
Laissez mon aile fatiguée éventer le passant
puisque la nuit déjà compare nos poussiers
et que l'ombre descend
sur les blondes palombes louées par la pâleur
J'attends l'orage désormais je cloue l'étang
au môle inquiet
Le chemin des saveurs que la fatigue ploie
trace dans l'aujourd'hui
de singuliers accents
et c'est peu dire que le regard fait loi
au port des habitudes aux
portes de l'instant
Si donc vous louvoyez aux marches de l'exil
laissez un peu l'hiver colorer le frisson
avant d'ouvrir le ban
une dernière fois
Jean Chatard
22:38 Publié dans Diérèse 68 | Lien permanent | Commentaires (0)
Diérèse 68 - en préparation : Gérard Le Gouic
L'auteur de "Sentiments obscurs" (éd. Coop Breizh, 1996, avec un avant-dire de Henri Thomas) fera paraître dans la prochaine livraison des poèmes inédits, dont :
PRIÈRE
Qu’est-ce cela
pour vous qui pouvez tout ?
Quelques mots, quelques sons,
une musique plus fluette
que celle du pinson,
une poignée de sable
que vous répandrez sur ma peau,
personne ne le remarquera
même pas la mouche ou le puceron.
Ce sera un secret
entre moi qui ne peut rien
et vous qui pouvez tout...
Gérard Le Gouic
14:50 Publié dans Diérèse 68 | Lien permanent | Commentaires (0)