06/04/2020
"L'instant d'après", de Max Alhau, éd. Brandes, 12 juillet 1986, 289 exemplaires, 40 pages.
à Muriel
Ce qui comble notre impatience, c'est cette ligne infranchissable après laquelle les signes, les repères se brouillent. Ni horizon ni point de reconnaissance mais l'énigme, l'emplacement définitif où se fige l'ombre, alors que la lumière a cessé depuis longtemps de baliser la terre.
A force de suivre le mouvement des vagues, la durée s'engloutit avec elles. Ni l'arbre ni le corps ne résistent : le vent et les rochers se révèlent l'un à l'autre, superbement étrangers. Nous aussi avons changé de camp et ce transfert a comblé notre ignorance.
Quelqu'un parle ou se tait, rien ne le désigne, sinon le crissement de ses pas, son ombre déportée. C'est tout ce que l'on soupçonne d'une présence offerte au vent, au vide.
Faire demi-tour en quête d'une piste serait trahir, suggérer plus qu'il n'est permis. L'obscur convient à ses seules preuves.
Le soir, quand on observe les objets les plus familiers, on éprouve la sensation d'échapper à son corps et au temps, d'être réduit à un seul regard.
Toute notion d'absence s'effondre au profit d'une présence infinie et pareille illusion nous contraint à nous résigner à cet état passager. Les choses n'en finissent pas de nous tenir en leur compagnie, de nous habiter jusqu'au jour où le congé devient définitif.
Max Alhau
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