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03/09/2014

Henri IV, le "Vert Galant"

         François-René de Chateaubriand, écrivain et homme politique, publia le texte, dans son Congrès de Vérone (1838), d'une lettre non datée adressée par Henri IV à Monsieur de Saint-Gelais. Il le faisait afin d'en proposer la comparaison flatteuse avec des lettres que lui-même avait reçu des souverains de son temps : "nous aimerions mieux avoir reçu de Henri IV, ce billet dont nous possédons l'original [...]. Le Béarnais ne se prend pas au sérieux, comme les potentats nos illustres correspondants : il se moque de lui, de ses légèretés et de ses couronnes" (T. II, p. 202). Voici un extrait de cette (superbe) lettre :

"Monsr l'aumonyer, je me rejouys avec vous de quoy vous estes maryé.
Il ne faut parller d'estre amoureus car il ne siet pas bien au gens mariés d'avoyr mettresse. Pour ce que je me gouverne aynsyn, je conseille à tous mes amys et servyteurs de fayre le samblable.
Vous an croyrés ce qu'il vous playra. Bien vous prieré-ge de fayre estat de plus que de personne du monde je desyreroys fort vous voyr & vostre cousyn St-Preu. Mon amy, aymés-moy bien tousjours, vostre plus asseuré amy à jamays Henry".

En 1599, le roi avait fait annuler son premier mariage avec Marguerite de Valois, dont l'inconduite était notoire, et il se remaria l'année suivante avec une princesse italienne fort riche, Marie de Médicis, qu'il ne cessa de tromper. Les liaisons les plus célèbres du "Vert Galant" furent Gabrielle d'Estrées, Henriette d'Entraygues, Jacqueline de Bueil, Charlotte des Essarts. Il laissa quatre enfants légitimes : Louis XIII, Elisabeth (qui épousa Philippe IV d'Espagne), Gaston d'Orléans et Henriette (mariée à Charles 1er d'Angleterre).

02/09/2014

Agrippa d'Aubigné (1552-1630), le prince des baroques : un regard sur "L'Histoire universelle"

               La fameuse "Histoire universelle" d'Agrippa d'Aubigné fut imprimée clandestinement car son auteur n'avait pas obtenu de privilège pour son ouvrage, ayant en outre refusé de communiquer son manuscrit au garde des sceaux Guillaume Du Vair ; il dut en conséquence se résoudre à faire venir dans sa propriété vendéenne de Maillé (près de Maillezais) l'imprimeur niortais Jean Moussat et ses ouvriers. Le premier volume fut achevé en mars 1618, le second en juillet 1619, mais Agrippa d'Aubigné ayant dû quitter Maillé pour Saint-Jean-d'Angély en décembre 1619, Jean Moussat le suivit et y acheva l'impression du troisième volume vers avril 1620. Cette édition originale a été condamnée à être brûlée dès le 2 janvier 1620 par le tribunal du Châtelet.

Chevalier vengeur du protestantisme, d'Aubigné sera pour Henri IV un ami fidèle, mais sans complaisance. Attaché au service du futur Henri IV, calviniste intransigeant marqué par la conjuration d'Amboise (1560), puis par le massacre de la Saint-Barthélémy auquel il échappa (1572), humaniste érudit autant que vaillant guerrier, il composa une oeuvre littéraire ardente et diverse à l'image de sa vie passionnée. Son amitié avec Henri IV ne fut pas sans orages et connut des éclipses : en 1577, quand celui-ci l'incita à écrire l'histoire de son règne, il lui aurait répondu : "Sire, commencez de faire & je commencerai d'escrire" (p. 6). C'est après l'abjuration du roi que d'Aubigné se retira à Maillé et qu'il y composa, en s'astreignant désormais à l'impartialité, son Histoire universelle principalement consacrée à la chronique du parti réformé de France.

Au-delà de la vie du futur Henri IV, qui fait le cadre historique de l'ouvrage, l'Histoire universelle embrasse toute l'époque, et toute l'Europe. A la connaissance qu'il a lui-même des faits, Agrippa d'Aubigné ajoute les témoignages d'autres protagonistes. Sa démarche d'historien s'explique par son engagement sans faille en faveur du protestantisme. Il avait conscience d'appartenir à une famille spirituelle massacrée et se sentait investi du devoir de mémoire. Il cultive un providentialisme semblable à celui que Calvin avait exposé dans le premier chapitre de son Institution chrétienne, et considère ainsi que Dieu est présent dans l'Histoire : "vous tirerez de ces narrations le vrai fruict de toute l'Histoire, qui est de connoistre en la folie & foiblesse des hommes, le jugement & la force de Dieu" (p.6). En revanche, s'il est l'homme d'un parti, il s'exprime sans haine dans cette oeuvre "en laquelle c'est chose merveilleuse qu'un esprit igné et violent de son naturel ne se soit montré en aucun point partisan, ait écrit sans louanges et blâmes, fidèle témoin et jamais juge" (adresse "Aux lecteurs" des Tragiques, 1616).

Figure majeure de la poésie baroque, d'Aubigné fut aussi un prosateur de grand talent. Fils de la Renaissance mariant la violence du temps et l'élégance érudite de la vie de cour, il laissa des pamphlets, un roman picaresque, de nombreux vers, mais surtout le recueil poétique des Tragiques et son Histoire universelle, qui racontent de deux manières différentes l'épopée du parti protestant. Ses qualités de prosateur sont éclatantes, où la plus grande précision se nimbe d'un sombre lyrisme. Ainsi par exemple quand il commente la mort d'Henri IV et la précarité des choses humaines :

"Les tragedies observent deux proprietez qui se tiennent bien la main ; c'est que non seulement elles ont des yssues lugubres & sanglantes ; mais aussi ont-elles des personnages ausquels il eschet de ne finir point à la mode des moindres & de la mediocrité [...]
Or voici la conclusion, non seulement de mon Histoire, mais de toutes celles qui ont esté escrites & s'escriront jamais [...], c'est que les succez envoient par force les yeux & les esprits de la terre tenebreuse au ciel luisant, des splendeurs qui passent aux eternelles, des roiaumes caduques au permanent, & enfin de ce qui paroist estre, vivre & regner, à ce qui seul est, vit & regne veritablement." (pp. 547-548) DM

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Un poème de René Char pour la rentrée

      En ce jour de rentrée des classes, un poème de René Char, extrait d'"Aromates chasseurs", imprimé par les éditions Gallimard à 4555 exemplaires (dont 20 hors commerce) le 26 février 1976. Voici :

LA RAINETTE

Rainette se confie à l'osier qui la hale. La branche humide retire sa robe. Ecorce et jeunes feuilles ont des égards pour un ventre héraldique ! La cuisson de la faux enflammée sera pour le bas monde des herbes mordillées.
L'aberration occupe tout le ciel : là-haut, le divin églantier fouette à mort ses étoiles.

                                                                                                         René Char

11:41 Publié dans Auteurs, Blog | Lien permanent | Commentaires (0)