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18/06/2018

Francisco de Quevedo y Villegas (1580-1645)

     Ho de la vie !... Personne qui réponde ?
     A l'aide, ô les antans que j'ai vécus !
     Dans mes années la Fortune a mordu ;
     Les Heures, ma folie les dissimule.


     Quoi ! sans pouvoir savoir où ni comment
     L'âge s'est évanoui et la vigueur !
     Manque la vie, le vécu seul subsiste ;
     Nulle calamité, autour, qui ne m'assiège.


     Hier s'en est allé, Demain n'est pas encore,
     Et Aujourd'hui s'en va sans même s'arrêter :
     Je suis un Fut, un Est, un Sera harassé.


     Dans l'aujourd'hui, l'hier et le demain, j'unis
     Les langes au linceul, et de moi ne demeurent
     Que les successions vives d'un défunt.

 

Francisco de Quevedo
Monuments de la mort
(Traduction Claude Esteban, Paris, Deyrolle, 1992)

10:15 Publié dans Hommage | Lien permanent | Commentaires (0)

16/06/2018

Deux témoignages sur l'homme et le poète que fut Jeanpyer Poëls

La lettre que je reçois d'un de ses anciens élèves, merci de votre lecture, vous pouvez la diffuser, tout comme celle qui suit, le plus largement possible, à bientôt, Daniel Martinez

Monsieur Martinez,
 
Je viens juste d'apprendre par votre blog le décès de Jeanpyer Poëls. Même si je le savais malade depuis de très nombreuses années et que, par le fait, on a coutume de dire "qu'il faut s'y attendre" cela n'apaise en rien mon chagrin. Je caressais l'espoir de le recroiser peut-être un jour prochain, physiquement. J'ai toujours une  pensée vers lui en passant à proximité de son lieu d'habitation lorsque je rentre de chez ma mère en passant par Orange. 
 
Récemment, je ne voyais pas venir de retour du dernier envoi que je lui avais fait parvenir fin avril : Une petite information, comme j'avais coutume de le faire, qui concernait une exposition personnelle montée dans le cadre du printemps des poètes à la librairie de Tarascon et dont le texte de présentation évoquait la formule d'Hölderlin sur la nécessité d'habiter poétiquement le monde. Pour moi Jeanpyer Poëls a habité et habitera toujours poétiquement ce monde.
 
Aujourd'hui encore à midi, je suis descendu vérifier le courrier. Peut-être qu'un fameux pli griffé de son écriture verte si personnelle est arrivé ?... Aujourd'hui à 15h, je sais que ce retour n'arrivera jamais. Plus jamais ces enveloppes, ces échanges, parfois complexes à déchiffrer, parfois laconiques, toujours comme des clins d’œil... Alors je pleure. Je pleure comme un enfant, comme ça ne m'est pas arrivé depuis des années, et je vous prie de bien vouloir m'excuser de vous adresser ce message plein de larmes. C'est parce que Jeanpyer Poëls m'avait mis en contact avec vous en début d'année, parce que je sais aussi ce qui vous liait, et la peine qui doit être la vôtre, que je me permets spontanément cette "impudeur"...
 
Jeanpyer Poëls était pour moi le professeur que je n'oublierai jamais, un poète d'une grande modestie, un ami...
 
Mes sentiments les meilleurs pour vous Monsieur Martinez,
 
comme il signait : "Bien amiKlement" 

Une seconde lettre, non moins émouvante, m'est parvenue le 28 juin, voici :
 

Monsieur,


à la suite de ce très beau message de son ancien élève, j'aimerais moi aussi rendre hommage à Jeanpyer POËLS et évoquer les valeurs de l'homme et du poète.
Je le ferai simplement, avec des mots colorés de souvenirs heureux liés à nos rencontres où contrairement à ce que disait RIMBAUD, la vraie vie n'était jamais absente.
Le début de ces rencontres remonte à l'année 1969 où étant devenus voisins, nous nous liâmes d'amitié.
Alors que ma vie se trouve prise dans les mailles d'un lourd handicap physique qui m'éloignera de toute scolarité, Jeanpyer repéra très vite mon intérêt pour la littérature en général et la poésie en particulier. Il me fit entre autres découvrir l'œuvre de RILKE, d'Henri MICHAUX et celle de René CHAR pour qui vivre c'est s'obstiner, sans oublier bien sûr, la revue DIERESE.

A la suite de son départ vers Orange, nos échanges devaient se poursuivre à travers une correspondance à l'encre verte.
C'est rempli de peine que je me permets d'écrire ces quelques lignes, mais tel que je connaissais Jeanpyer, il n'aurait pas aimé que nous soyons tristes.

Je garde dans les oreilles cette voix lente qui laissait entendre une gourmandise langagière qui se retrouvait d'ailleurs dans sa poésie faite de recherches et de cet effort obstiné de dire dont parle James Sacré, et qui n'avait rien à voir avec ces faiseurs de vers dont parle Verlaine, en qui Georges Bataille ne voyait qu'une poésie gluante.

Cette voix ne se faisait jamais prier pour fustiger les faux-semblants d'un monde ne correspondant pas à sa conception de l'essentiel.

Je terminerai en disant que Jeanpyer ne nous a pas quittés, la vie bien plus que l'existence, il a simplement mit un terme à notre plaisir d'ouvrir l'un de ces courriers écrit à l'encre verte et sentant bon l'affection.

Avec tout mon respect et ma considération.


Christian PLUMECOCQ

 
 

11:59 Publié dans Hommage | Lien permanent | Commentaires (0)

14/06/2018

Jeanpyer Poëls nous a quittés (1940-2018)

Le 10 juin, au moment où justement se terminait le Marché de la Poésie à Paris, Jeanpyer Poëls s'est éteint. Toute sa vie aura été consacrée à la Poésie, il m'aura fait connaître entre autres Bernard Noël, le traducteur Joël Vincent et des artistes, comme Corina Sbaffo, Gabrielle Burel, Mylène Besson.
Grande est ma tristesse, il fut l'un des piliers de Diérèse. Nous avons entretenu une correspondance suivie. Critique à la NRF, à Europe notamment, il a publié dans nombre de revues, comme Triages, Europe, Diérèse bien sûr... Au vrai, nous sommes bien peu de chose. Il en avait conscience, le titre de son dernier opus, paru chez Yves Perrine aux éditions La Porte le disait bien : La mort et la vie se mentent, chroniqué par Eric Barbier dans le numéro 73 de Diérèse, page 279. Le numéro 74 lui sera dédié. Amitiés partagées, Daniel Martinez.

11:01 Publié dans Hommage | Lien permanent | Commentaires (0)