24/10/2017
Au fil de l'eau : Jean-Claude Pirotte
Ce dessin, inédit, quelques touches automnales sur Canson ivoire
Tout subsiste, tout demeure. Le bois d'aubier que revêt l'écorce, l'essaim blanc de l'attente entre les mains du mystère le plus pur. D'est en ouest, les oracles dans le grand miroir, vers cet inconnu qui attend, qui nous est cher : la couleur passée à l'envers des feuilles, roulée dans les eaux de la parole, toujours là, dans le matin qui tremble je t'entends et j'appose le nom des choses. Avec dans les mains un carnet resté ouvert, les embruns en sont l'encre, ont enlacé la langue des vagues, ont traversé le corps de la nuit, les pieux rongés de sel et le rouleau des légendes vivantes. Tout subsiste, tout demeure. Une table d'eau verte enluminée, un oiseau sylvestre magnétisant la lune, l'écume saigne sur le visage du jour et sur la vitre de la pièce nue. C'est un refrain entêtant, un bourdonnement sans origine, des mots étouffés qui jaillissent des fissures des rochers. Tout subsiste, tout demeure... DM
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26/05/2017
Jean-Claude Pirotte (1939-2014) et les Lettres du Cabardès
Françoise R. écrit, à propos de Jean-Claude P. :
"Pleine de tristesse, depuis votre message de dimanche sur le blog, je veux juste dire la peine d'une lectrice lointaine et inconnue de Jean-Claude Pirotte. Ses livres resteront sur l'étagère, tout près de ceux d'André Dhôtel, les Aimés. Sa voix accompagne depuis tant d'années mes saisons ! Mais je sais aussi que, comme la petite boîte à musique de l'enfance, ses poèmes feront encore et encore danser les heures boiteuses. Merci et toutes mes pensées à ses proches. "
* * *
Dans le courrier qui suit, en date du 16 septembre 2008, J-C P. se plaint de la fin annoncée de cette belle réalisation que furent les Lettres du Cabardès, il en donne la raison précise. Les poèmes qu'il envoyait à Diérèse étaient manuscrits, écrits au stylo-plume noir.
Quant à son allusion aux lettres de Henri Thomas, il s'agit de celles publiées in Diérèse 40 (printemps 2008), inédites, adressées dans les tout derniers mois de sa vie au poète quimperlais Gérard Le Gouic. Jean-Claude, qui aimait plus que tout et pour des raisons que l'on aura devinées, Le Migrateur, de Henri Thomas, pensait qu'un Cahier de la NRF, a minima, pouvait mettre l'accent sur l’œuvre épistolaire de l'auteur des Maisons brûlées. Depuis, un intéressant Choix de lettres, 1923-1993 a bien été publié par les éd. Gallimard, et ce n'est que justice. DM
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21/10/2016
"Rondeau" de Jean-Claude Pirotte
rondeau
chaque cerisier me rappelle
à Fougerolles ce printemps
les baladins d'Apollinaire
qui ont des ours et des enfants
comme hélas on n'en voit plus guère
ils sont bannis depuis longtemps
chaque cerisier me rappelle
les maraudes et la lumière
des vergers et le chant du ciel
et le silence des étangs
de Fougerolles au printemps
et les signes que font de loin
les hameaux oubliés du temps
d'où sont bannis depuis longtemps
les baladins
Jean-Claude Pirotte, Fougerolles
* *
Les saltimbanques
Dans la plaine les baladins
S’éloignent au long des jardins
Devant l’huis des auberges grises
Par les villages sans églises.
Et les enfants s’en vont devant
Les autres suivent en rêvant
Chaque arbre fruitier se résigne
Quand de très loin ils lui font signe.
Ils ont des poids ronds ou carrés
Des tambours, des cerceaux dorés
L’ours et le singe, animaux sages
Quêtent des sous sur leur passage.
Guillaume Apollinaire, Alcools
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