08/02/2020
Michael Krüger, traduit par Joël Vincent, dans le numéro 78 de Diérèse
SARAJEVO
Der Krieg hat den holzkohlenrauch
über der Stadt stehen gelassen,
man empfängt ihn mit offenen Händen.
Ich besuche den Dichter Izer Sarajlic
auf dem Friedhof der Atheisten.
Reden wir nicht von Gerechtigkeit,
sagt er, sie ist klein wie eine Naselnuss
und leer. Von seinem Nachbarn
ist nur die linke Hand begraben,
der Rest war nicht aufzufinden im Krieg.
Das bosnische Totenbuch besteht
aus tausend wortgewaltigen Tränen,
die wollen die Erde zermürben,
bevor der Muezzin ruft zum Gebet.
Nach Mitternacht ein kyrillischer Regen,
er schmeckt nach Hafermehl und Minze
und wird vom Teufel serviert.
SARAJEVO
La guerre a laissé là une nappe de fumée
de charbon de bois au-dessus de la ville,
on la reçoit avec la paume des mains.
Je rends visite au poète Izet Sarajlic *
au cimetière des athées.
Ne parlons pas de justice,
dit-il, elle est aussi petite qu’une noisette
et vide. De son voisin
n’est enterrée que la main gauche,
le reste fut introuvable en pleine guerre.
Le livre des morts bosniaque se compose
de milliers de larmes, signes de la force des mots,
qui veulent éroder la terre,
avant l’appel du muezzin pour la prière.
Minuit passé, une pluie cyrillique,
au goût de farine d’avoine et de menthe
est servie par le diable.
* poète bosniaque qui mit fin à ses jours, en se pendant (1930-2002).
Ceija Stojka, huile sur toile, sans titre
20:54 Publié dans Diérèse 78 | Lien permanent | Commentaires (0)
Daniel Abel, à lire in Diérèse 78
Le tout dernier surréaliste, qui ait côtoyé André et Élisa Breton : dans ses œuvres, pour Diérèse. Homme généreux par essence, loin du tout-venant littéraire et du souci de notoriété, ce qui le rend attachant, dès le premier abord, voyez et jugez-en plutôt :
MIETTES DE RÊVES ET AUTRES (2)
à Denise
"Jadis Tchouang Tchéou rêva qu’il était un papillon voltigeant et satisfait de son sort et ignorant qu’il était Tchéou lui-même. Brusquement il s’éveilla et s’aperçut avec étonnement qu’il était Tchéou. Il ne sut plus s’il était Tchéou rêvant qu’il était un papillon ou un papillon rêvant qu’il était Tchéou..." Liou Kia-hway
En Ardèche dans la maison hors du commun, classée au Patrimoine, de nos amis Claude et Joël Unal. La forêt autour, enveloppant les bulles, alvéoles d’habitation, de blancheur irradiante. Concert des cigales. Joël m’a parlé d’un insecte très rare, tout à fait remarquable. Je pars à sa recherche… Apparaît une créature insolite, de grande taille, tout en élytres, appendices, mandibules. Je l’enfourche, le "grand Sagapedo" déplie ses ailes, survole la forêt, la colline, la rivière dans le val parvient au sommet de la montagne où il se pose. Il arbore le visage de Joël.
***
Avec Élisa Breton, Denise et moi au marché de Limognes, de l’autre côté du causse. Aux étals soupeser un melon, humer une aubergine…
La fleuriste : "Qui veut mes jolies fleurs ?
- Moi",
s’écrie Élisa, devenue petite fille. Toutes les fleurs s’envolent, se fixent sur la robe d’Élisa, qui lui arrive aux chevilles, lui donnant un air printanier parmi les papillons qui volètent autour d’elle...
Daniel Abel
aquarelle inédite de Jean-Claude Pirotte
20:18 Publié dans Diérèse 78 | Lien permanent | Commentaires (0)
05/02/2020
Eric Barbier avec ses "Oiseaux de passage", à lire in Diérèse 78
Oiseaux de passage
La raison de ce voyage en ces régions méridionales était le tournage d’un documentaire destiné à l’une des trois chaines de la télévision publique, un long entretien avec ce vénérable écrivain devenu au fil des rencontres un ami et dont l’indifférence plus que l’oubli recouvrait peu à peu l’œuvre. L’équipe technique le rejoindrait le surlendemain dans ce mas isolé mais déjà peu éloigné de la grande ville. Le réalisateur arrêta le véhicule de location sur le bas-côté de l’étroite route, attiré par le murmure d’un ruisseau et l’ombre des yeuses. L’ensemble des questions à poser méritait encore réflexion. Le film serait diffusé en début de soirée, partagé en cinq épisodes de dix minutes chacun. Une belle opportunité. En revenant de sa brève promenade il dut constater que trois des quatre pneumatiques de la voiture avaient été lacérés à l’aide d’une forte lame, bien que ce ne fût encore l’époque où ces bois étaient fréquentés par les cueilleurs de champignons. L’homme fut donc contraint d’arriver avec un grand retard chez un hôte qui accusait son âge : ils se disputèrent, le film ne se tourna pas...
Eric Barbier
08:01 Publié dans Diérèse 78 | Lien permanent | Commentaires (0)