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03/07/2020

Françoise Hàn nous a quittés ce mercredi 1er juillet

C'est avec peine que je vous annonce ce jour le décès de la poétesse Françoise Hàn, dont celles et ceux qui l'ont approchée, lue, connaissent la bonté qui émanait d'elle et sa force d'âme... Tous mes regrets à ses proches, je m'associe à leur peine, partagée.

Françoise Hàn avait participé au numéro 52/53 de Diérèse (co-dirigé avec Isabelle Lévesque), consacré à Thierry Metz. Voici ce qu'elle y a écrit, qui demeure :

Le temps ne lui a pas creusé une absence
à la présence parmi nous de T.M.


Il est présent parmi nous
mais il n’appartient pas
au présent désemparé
qui dérive et s’enfonce

il appartient à l’espace
entrevu entre les poutrelles
entre les mots
à l’espace où le battement d’une aile
annonce un au-delà des décombres

il appartient au chantier
qui doit sans cesse refaire
la vieille fabrique du monde
il en est le manœuvre
des fondations jusqu’à l’arc-en-ciel
il porte nos silences dans son auge
en maçonne le poème
commencé bien avant nous

le poème qui cherche à comprendre
d’échafaudage en échafaudage
notre venue ici
notre pourquoi parmi les pierres
le poème jamais fini

il appartient au rêve
de l’homme couché au fond du puits
à la lampe allumée des millions d’années plus tôt
qui l’éclaire et vacille entre nos mains

à la question posée comme l’oiseau
sur le bâton devant lui
reprise à chaque envol
peinte sur les parois de la grotte
ponctuées de signes non déchiffrés

à notre lecture incertaine
à nos attentes mais aussi
à l’inattendu qui embrase la poussière

il appartient à la terre
à d’immenses paysages
labourés de siècle en siècle
à leurs horizons soulevés

à la résurgence des sources
à la soif qu’elles étanchent
à celle qui ne s’étanche pas
qui a fait surgir le langage

au langage lui-même
champ prodigieux
qui s’augmente se multiplie
et repousse les horizons
de labour en labour

La nuit ne le dérobe pas à nos regards
il appartient aux constellations
il avance parmi elles

à la verticale de l’enclume
où nous martelons nos regrets nos désirs
à la verticale de l’instant
où jaillit l’étincelle

à la verticale du tressaillement
bien plus lumineux que l’immortalité
qui nous saisit à toucher le monde


Françoise Hàn

02/07/2020

"La Maison des mémorables", de Jean-François Rollin, éd. Champ Vallon, février 1989, 160 p., 92 F

Ô splendeur calme,
limpide regard des statues,
pluie de roses sur la ville
à son réveil,
lorsqu'il s'en retourne dormir,
les rideaux s'interposent,
et c'est tout l'espace qui revient,
blondeur légère au-dessus des avenues marines
tirées vers le grand lieu hauturier et mobile
où le soleil commence.


Sur la cheminée,
verrerie gracile,
est posée la carafe.
D'une telle transparence,
l'instant d'un éclat,
multiples mouvances au plafond,
ciel éphémère inventé par le matin,
pâle et rose nue bouclée,
c'est le vent sur son erre
sous l'éther surgi du chiffre.

 

Jean-François Rollin

 

DANIEL-COURTOIS  3.jpg

 

 

 

 

 

 

 



 

 

 

 

02:36 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

01/07/2020

"Carnet d'un buveur de ciel", de Dominique Sampiero, éditions Lettres Vives, octobre 2007, 96 p., 13 €

Quand les mots se rétractent jusqu'à l'os, se taire fait craquer les gencives, les phalanges, et c'est une terre noire, plus sombre que la nuit, un trou béant dans la présence où tombent les regards les uns après les autres comme des feuilles mortes.


Alors les regards m'évitent, les silhouettes croisées ont peur de tomber dans cette absence, ce ciel vide qui plane au fond de moi, ce ciel sans bord, infini, cette pure présence où je m'avale, dévale, je passe à travers, mes doigts se crispent, puis je respire, je relâche, et je plane, à force, dans cette chute sans fond avec un visage de feuille morte.


Je n'existe que par ressemblance. Je suis présent par petits bouts, par morceaux. De grandes bourrasques roulent leurs rires ou leurs larmes et me dictent des pensées d'oiseaux, d'enfants enivrés par le tabac. Au réveil, me reste l'impression d'être passé à côté d'un ami sans le reconnaître. Quelque chose comme un rêve qu'on a oublié d'écrire. Moi, tout simplement.

 

Dominique Sampiero

07:14 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)