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28/01/2021

Un Voyage en Tunisie

Ces notes, qui datent de 1997, impressions brutes, goût de l'aventure, îlots mémoriels, voici :

"Départ de Marseille par le Rodanthi, à 19h30 au lieu de 18h00. Fauteuil pour chacun, la nuit sur l'eau qui mousse, mais incroyable : les hommes d'un côté, les femmes de l'autre. Profiter d'un moment d'inattention du sbire pour rejoindre Annie, échanger quelques mots, puis le blouson sur la tête pour dormir. Nuit infâme, courbaturés nous le sommes, au final. Tôt le matin, depuis le poste de pilotage, sur le pont où nous sommes montés, pour voir. A nos côtés, la Sardaigne : "Un géant nous regarde !" 
Plus loin, nous en approchant, c'est un phare que croise le ferry-boat, par un petit vent d'aube brumeux à souhait, nous piquant le blanc des yeux, comme par surprise. Sous la coque, un sillage bleu vert, crémeux. Matinée de soleil sur le pont. Nous discutons avec Ophélie, une jeune lyonnaise, qui nous apprend qu'érémiste, elle n'avait plus rien à perdre. Elle s'en va vivre à Sousse, "ville où il n'y a rien, ou à peu près, que la vie à goûter dans sa mélodieuse sérénité". Nous l'encourageons dans ce sens. Y croire, c'est aussi et surtout risquer de gagner l'aventure. En battant les cartes, les jeux ne sont pas faits.

Après-midi passée à tracer au feutre orangé notre itinéraire pour les deux semaines à venir : objectif, traverser tout le sud tunisien jusqu'à Bordj El Khedra (si possible). Je repense à Hubert Lucot, dont la femme est native de Gabès. Au jour d'aujourd'hui, et ce qu'il m'a fait envoyer pour Diérèse laissé sur ma table de travail, en Seine-et-Marne, à Ozoir, ma ville d'adoption. Pauvrette, dont il ne fait que parler, la Femme dans tous ses états, heureuse vraiment ?, la concernant, glotte sèche. Soins palliatifs et mort annoncée, voilà. Le sang noir, aurait dit Guilloux. Terrible, la destinée, quand la grande faucheuse aiguise l'acier du tranchoir.

Il faudrait un deuxième jerrycan de 20 litres, nous le prendrons sur l'île, à Djerba même. A 18h02 précises, le soleil, englouti. La nuit se fait pressante. Sur le pont, un des serveurs courbe la main au-dessus de l'astre déliquescent, comme s'il pouvait accélérer sa progressive disparition. Qu'il pouvait, le touchant, ne pas s'y brûler... voire l'enfoncer lui-même dans la grande bleue (la tête de mon ennemi sous l'eau : un retour à l'enfance, toujours. Nage dans une oasis, une palmeraie, premier visage du Paradis).

Pour repas : au menu, des rougets grillés accompagnés d'une paella maison. On se parle et l'on savoure à petits prix, Ophélie s'est jointe à nous, des gambas arrosés de lichées de rosé frais : du Mornag sur la table, une bouteille aux courbes d'amphore. Pointant une ville à peine indiquée sur la carte entièrement déployée, l'itinéraire dessiné. La brise nous oblige à la refermer au plus vite, tandis que ses pages dépliées en éventail n'arrêtent pas de claquer sur elles-mêmes. Les côtes, enfin...

Et des étoiles vives dans les yeux."

Daniel Martinez

03:18 Publié dans Journal | Lien permanent | Commentaires (0)

27/01/2021

"A-Eden" suivi de "La soif charnelle", Jean Maison, éditions Ad Solem, 104 pages, 1/11/2018, 10,90 €

    C'est d'elle dont je parle
     Sa parole est notre voix
     Quintessence clandestine
     Dans l'âtre de l'apparition


     Je vous sais gré
     Éperdue d'origine
     D'avoir confronté ma parole
     A ma sincérité


     Courbé de draps en eaux
     Je dois me secourir
     Aller chercher l'humble


     Dame     seule venue
     Gracieuse d'avant la fronde


     Ornée de pauvres sifflets
     De lettres enfuies sur la page


Jean Maison

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02:39 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

26/01/2021

"La peau de l'ours", de Pierre Maubé, préface de Michel Baglin, éditions au pont 9, 2018, 152 pages, 17,90 €

Ce lieu commun à la parole et au silence, commun aux errants et aux morts, à l'espérance et au regret, à ceux qui se croisent et se devinent et parfois se rencontrent, ces limbes d'encre, ce carrefour improbable de mots naissants, de nuit épaisse, de sens semi-présent, de terre calcinée, de peur nouvelle et d'aube nue,


ce lieu commun, je le nomme poème, lieu d'hésitation et de vacance, brûlé au fil des jours sans ombre, lieu de perte et de recherche, lieu offert au ciel de toute absence, lieu calciné, détissé de vertiges, lieu de tâtonnements et de violence, lieu de désirs et de torture, lieu de remords et de patience, lieu de fièvre inachevée, de cendres mauves, lieu de feu noyé et de soif inutile.


Pierre Maubé


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02:19 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)