30/07/2014
Poèmes à Gaëlle IV
IV
Et si ma vie n'était
face à la tienne qui me porte
mon enfant mon coeur
que bien peu si peu dis-moi donc
où prend source
ce fleuve en majesté
dont les eaux se font jours
sur la robe de la terre
A deux pas de l'échelle du soleil
à même la toile miroitante de lumière
un pope de bleu vêtu évente l'avenir
dans l'espace de tes pensées
flottent les miennes
à la découverte d'images
autrement assemblées
elles apprivoisent le hasard
le passage de l'un à l'autre
par le verbe serein
Lorsque les îles commenceront
de monter sur les eaux
mille tresses effilochées
réouvriront cette densité
qui fait écho au vide
et s'éblouit de son éveil
devant ce feu d'épines sur la roche
embrasée par les vents
et les rayons cardinaux
Daniel Martinez
In "Eden", lire aussi les notes blog du 17/6, 22/6, 25/6, 29/7
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29/07/2014
Poèmes à Gaëlle III
III
Arrivée là parmi nous qui sommes
un peu de ce grand tout
à lui-même livré
avides d'une éternité
où d'une amande de silence
dériverait le blanc iridescent
où sous le cri muet se profilerait
l'ange en patience celui du Fra
j'ouvre avec force mes paupières
pour que s'y diffracte
sur l'écran élargi de l'Avant-scène
la première lumière de l'espace
chambre d'échos
entre le corps et le monde en gésine
dans la giration du temps
qui se distend
de l'intérieur et de l'extérieur tout à la fois
Conquis par les images réminiscentes
par les chaudes senteurs du chèvrefeuille
à la fenêtre de cet été
je te regarde encore
associe les lignes nervurées de tes mains
aux desseins des rosiers grimpant
sur le treillis de la façade
pour entrer de concert
dans le bleu chaviré du grand fond
qui t'a vue paraitre
avec des mouvements de mousses et d'ailes
avec les fils encore scintillants
de ce mardi dont j'ai gardé
au creux des paumes
la flamme intense des matins
qui jamais ne brûle
que dans l'euphorie de ses propres couleurs
Daniel Martinez
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18/07/2014
De Diérèse opus 63 au comte de Lautréamont (1846-1870)
Tout d'abord, des nouvelles du nouveau Diérèse, le numéro 63. La maquette est presque prête ; l'après-midi quasi caniculaire m'a incité à "tracer" comme l'on dit en ski, et à éviter plus que tout l'endormissement – ce qui ne fut pas chose aisée. Voici déjà les deux pages du sommaire, que je vous laisse découvrir. C'est l'occasion de remercier ici Isabelle Lévesque pour son aide précieuse à la confection de cette livraison, étoffée pour le moins et qui ne manquera pas de susciter des commentaires. Mais de grâce, patientez encore pour l'impression proprement dite de ce numéro. Merci pour votre attention.
Les Chants de Maldoror
Vous n'êtes pas sans savoir que Genonceaux, l'éditeur d'Isidore Ducasse (comte de Lautréamont), suspendit la première édition des "Chants de Maldoror", effrayé sans doute par le caractère sulfureux de l'ouvrage. Ce ne fut qu'à la deuxième édition, tirée à seulement 150 exemplaires, que le fameux comte de Lautréamont gagna certaine notoriété. C'est l'édition de 1890 qui fit monter Léon Bloy sur ses grands chevaux et provoqua sa tonitruante réplique dans "Le Cabanon de Prométhée", plus tard incluse dans Belluaires et porchers (1905). Mais elle est aussi, ne l'oublions pas, l'édition "pataphysique" de référence, celle que Jarry avait sous les yeux quand il écrivait son inénarrable "Faustroll"... Lecture qu'affectionneront de même, comme il vous a déjà été dit (voir note blog du 8/6), Henri Michaux et Marie-Louise Termet qui, "le soir, se lisaient à voix haute Lautréamont".
Cette seconde édition est illustrée en frontispice d'une gravure macabre de José Roy, avec un fac-similé, et une préface de l'éditeur. Le plus étonnant pour nous, ce sont les efforts de Genonceaux, dans cette préface, pour prouver qu'Isidore Ducasse n'était pas fou. Léon Bloy venait de dire que l'auteur des CHANTS était mort à l'asile. Genonceaux, donc, fait appel à un graphologue pour analyser l'écriture d'une lettre de Ducasse à son banquier Darasse. Diagnostic : Lautréamont était un logicien de premier ordre. "Mon corps fera une apparition devant la porte de votre banque" écrit Isidore à son banquier. On ne sait pas assez que ce dernier habitait au 5 rue de Lille, dans le 7e arrondissement de Paris, c'est-à-dire précisément là où, un siècle plus tard, officiera Lacan, qui nous apprend que : "Le style c'est [...] l'homme à qui l'on s'adresse" (sic). Une plaque, selon moi, désormais, s'impose : "Lautréamont, en 1870, venait retirer son argent ici." Allez-y voir, si vous ne voulez pas me croire.
Daniel Martinez
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