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10/01/2021

"Puisqu'il est ce silence * prose pour Henri Meschonnic", de Jacques Ancet, éd. Lettres Vives, mars 2010, 64 pages, 12 €

Rappelons que Henri Meschonnic (qui vivait en Seine-et-Marne) a écrit l'éditorial du n° 38 de Diérèse (octobre 2007), intitulé "C'est le poème..." ; et a confié des poèmes à la revue (dans ses numéros 38 et 45).

* * *

On l'entend. Il parle. Dans le silence. Puisqu'il est ce silence. Sans lèvres, il parle. C'est comme un bruit d'eau, un courant sous les mots. Qu'il dise critique, corps, arbre, rythme, poème, c'est le même mouvement toujours qui les emporte, le même vent - air ou eau, c'est pareil. Et c'est ce qui, avec lui, emporte vers ce qu'on ne voit pas mais qu'on entend partout. Et qu'on répète sans savoir. Avec, dans la bouche, ce souffle qu'on croit avoir - et c'est le sien.


Dans la beauté, toujours. Les arbres qui font la roue, les champs qui étincellent. Dans ce printemps qu'on essaye de garder pour lui. Dans l'espace et le temps des corps. Dans tout ce qui s'appelle vivre - le petit vent, les feuilles qui grésillent, les cris d'oiseaux. Dans le rien du jour, c'est lui, on le sait bien. Parce qu'on le voit, parce qu'on l'entend et qu'il est fait de ce regard, de cette écoute. Dans l'impossible retour, dans l'impossible demain, juste là, au bord, sur le fil du présent, il sourit, il vacille, il sourit.


Jacques Ancet

09:44 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

08/01/2021

"Les exercices du regard", André Verdet, éditions Galilée, septembre 1991, 56 pages, 60 F

Elle vivait à l'écart ses dernières lueurs


elle n'avait plus grand-chose à dire
qui ne fût du passé l'étoile


plus que détresse ou désespoir
ses signes étaient renoncement


dans l'ultra lointain lumineux
elle crut entrevoir le spectre
d'une compagne de jadis celle
de premiers jeux de l'enfance rieuse


assourdies des ondes lui parvenaient encore
qui n'étaient plus l'écho de choses familières


pourquoi tant de solitude
pourquoi tant de pauvreté


elle qui avait tant et tant
et plus encore qu'elle-même
à pleins rayons prodigué


n'avait-elle gagné auréole diaprée
pour avoir su capter et attirer vers elle
ces présences amies les planètes et lunes


André Verdet

14:45 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)

06/01/2021

En poème, un fait divers, signé par Alain Duault

Au courrier d'hier, m'est arrivé ce poème d'Alain Duault, touchant à plus d'un titre, que je vous donne à lire sans tarder. Rappelons que le poète a offert à Diérèse "La rivière des neuf dragons" (p. 68 à 79) dans son dernier numéro paru, le 79. Amitiés partagées, Daniel Martinez

 ₰

L’amour du cygne

 

Le 23 décembre 2020, un cygne a interrompu le trafic

Entre Cassel et Göttingen. 23 trains sont restés arrêtés.

Le bel oiseau était en deuil de sa compagne foudroyée

En traversant les voies et, blotti contre elle, il a refusé

De l’abandonner. Figé dans sa douleur, l’a tant veillée,

La caressant tendrement pendant toute une heure avec

Un tel amour, que les pompiers ont dû intervenir pour

Emporter le cygne mort et le cygne désespéré jusqu’à

La rivière Fulda. J’aurais aimé les entendre murmurer.

 

                                                  Alain Duault

CYGNE BLOG.jpg

Dessin de Pacôme Yerma