12/05/2021
"A quoi bon la poésie aujourd'hui ?", de Jean-Claude Pinson, éditions Pleins Feux, avril 1999, 72 p., 7,20 €
Au-delà du simple plaisir du texte, que peux donc nous apporter la lecture d'un poème ? Que cherchons-nous quand nous lisons de la poésie ? Des modèles de vie où nous puissions puiser des enseignements pour la nôtre ? Mais alors, mieux vaut lire des biographies de poètes. Sans compter qu'un tel bénéfice éthique n'est pas spécifique à la poésie.
Car cette vertu éthique d'"édification" de soi, par laquelle des livres nous aident à nous faire les "poètes" de notre propre existence, vaut pour la littérature en général et même pour des arts qui lui sont étrangers - le cinéma par exemple, autrement plus puissant, aujourd'hui, dans la configuration moderne de la culture. Et s'il s'agit de chercher des modèles de vie afin de sans cesse "refigurer" notre incertaine identité, alors sans doute le roman (ou plus largement le récit), en tant qu'il met en scène des personnages et configure narrativement le temps vécu (qui est aussi un temps social), est-il plus adéquat à cette fonction éthique que la poésie elle-même.
En réalité, c'est dans une sorte d'entre-deux, à mi-chemin de l'intelligence d'un sens et de la sensibilité aux formes verbales, là où se fait l'hésitation entre sens et son, que l'onde du poème se déploie. Sollicitant, plutôt que notre intelligence narrative, une compréhension qu'on pourrait dire "affective", le poème lance ses mots, comme autant de sondes, en direction des assises les plus enfouies de notre présence sensible au monde. Il fait vibrer en nous la corde énigmatique du temps en ce qu'il a de plus inscrutable. Il excite les nervures les plus secrètes de notre habitation corporelle et spatiale du monde. De la sorte, ce n'est pas un message qu'il délivre, ni quoi que ce soit qui puisse être de l'ordre d'un enseignement doctrinaire. Il ne met pas en vers des idées ; il dessine et décline des versions de mondes qui sont autant d'esquisses d'une autre économie possible de l'existence - d'un autre éthos (séjour), qui serait, selon le mot de Mallarmé, plus "authentique".
Certes, il est sans doute bien difficile de déterminer par quelle aléatoire capillarité de telles esquisses peuvent bien se diffuser et être d'une quelconque efficience. Il n'est pas impossible, toutefois, sans céder à nouveau à l'illusion romantique d'une révolution de la vie par la poésie, de cerner plus précisément quelques modalités de l'action qui peut être celle de la poésie sur l'existence.
La poésie comme tonifiant de l'existence
La vie ne tient qu'à un fil - celui que la Parque est toujours prête à couper. Le désir de vivre lui-même est fragile, et c'est pourquoi nous cherchons sans arrêt de quoi en retendre le ressort, afin que notre existence ne soit pas trop soumise à ce qui l'aliène et la défait. La poésie (mais non elle seule) peut y contribuer.
Jean-Claude Pinson
17:12 Publié dans Points de vue | Lien permanent | Commentaires (0)
Pourquoi la Voie lactée se nomme-t-elle ainsi ?
La galaxie dans laquelle se trouve notre planète Terre s'appelle "la Voie lactée". Un nom dont l'origine remonte à l'Antiquité.
Selon la mythologie grecque, elle aurait en effet été créée par Héraclès, fruit d'une relation adultérine entre Zeus et Alcème, une humaine. Comme l'enfant n'était qu'un demi-dieu, il ne pouvait prétendre à l'immortalité. Mais son père voulait le voir vivre éternellement. C'était bien la moindre des choses pour le dieu le plus puissant du panthéon.
D'après la légende, Ζεύς aurait donc profité du sommeil de sa femme, la déesse Héra, pour faire téter son sein au tout jeune Héraclès qui, n'y voyant que du feu, s'exécuta de bonne grâce. Mais celle-ci se serait réveillée et aurait repoussé violemment l'enfant né d'une relation extraconjugale. Ce dernier aurait alors laissé s'échapper de sa bouche une traînée de lait de la divine Héra, qui, projetée dans le ciel, aurait formé la bande blanchâtre formant la Voie lactée. Une légende devenue ensuite universelle.
16:31 Publié dans Le saviez-vous ? | Lien permanent | Commentaires (0)
11/05/2021
"Si bien qu'affleure", de Daniel Martinez
1.
Sous la fuite des pages
le chemin parcouru
et le sentiment d'une vie
comme enlevée au paysage
leurres des voix
dont l’écho assourdi
éveille le grain des blés
mais rien encore pour dire
la fibre d'un corps second
la cendre d'une vision
au fil perdu d’une histoire
on entendrait presque respirer
les ramilles poudreuses
la plante d'Artémis et le séneçon
entre les gris et les bleus de l'espace
qui là-haut
invitent au ravissement
la conscience
en ses desseins
* * *
2.
Venise au crépuscule
dans le tremblé de vieux périples
telle une langue d’éther
où libres glisseraient
tes bas bleus
au désir veilleur d’un jour
sous les pontons de bois
sans la minéralité
de la matière
Frotté de doutes
au sein du Tout
venez à moi passantes, venez couleurs
sèves d’émeraude risées d’iris
graver vos larmes
sur le baguier sonore
faites neiger en moi
tout un sari d’étoiles
devant le carafon de vin
la rose est Une
comme la langue en jeu
suit sa mesure malgré les maux
sans fin se recompose
Venise où toutes formes chuchotent
devant chaque porte
leur écume
figée à même les reflets
de la nouvelle lune
où l’eau chansonne
mezza voce
le secret de la Figure
Daniel Martinez
20:40 Publié dans Instantanés | Lien permanent | Commentaires (0)