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24/05/2015

Poèmes à Gaëlle, XVII

XVII

Aube radieuse où à l'eau du bassin s'est mêlée
ce que Mallarmé appelait "une goutte de néant"
s'éveillent les oiseaux là dans la paix de l'été
leurs cris blancs parmi les couleurs inertes
le Jardin surpris et ses précieux arômes
comme autant d'issues dans le temps
compté sans compter égrenant les moments
scandant le flux et le reflux et les migrations
du corps et de la pensée les mots partent ainsi

je ne retiens rien qui puisse aller
à leur encontre ils me viennent tels
étrangers d'abord parmi ces choses qui m'entourent
et comme des odeurs de terre rouge
des fruits engorgés d'eau dans le compotier
nés au monde et du monde
du sommeil encore sur ta peau
ma belle ma rayonnante

tu sais ce qui s'appelle Soleil
basculé dans le vert reprenant ses haillons
dans l'ordre rêvé la roue des insectes
lorsque s'incline la terre
renaissante à chaque enclos
il n'est que plus urgent de vivre
avec le goût sur la langue de ce qui est fondu

sur le tissu des minutes qui comble
la distance entre maintenant et maintenant
le mot singulier glisse pur
sans précédence ni succession semble-t-il
il s'inscrit de lui-même je le vois
je te vois le perçois comme les battements
de ton coeur sous les masses bruissantes
un vent léger traversé de tous les espaces sédentaires
porte louange de la trace disparaissante
sur l'impassible blancheur des roses

où tout reste à écrire ce désir ah ! de toucher
ce qui n'a pas de nom au croisement des saisons
jour de cantates et de fugues monde ouvert
monde possible monde secret mesuré et libre

                                      Daniel Martinez

09:23 Publié dans Eden | Lien permanent | Commentaires (0)

16/05/2015

Poèmes à Gaëlle, XVI

XVI

Je t'écris je rêve sur cette marge
où passent les songes
nuages légers et nuits épaisses
le présent qu'ils se font l'un à l'autre
dans l'instance du présent

J'avais entre les mains deux livres
secoués de leur poussière
c'était là notre histoire
tour à tour souterraine et résurgente
elle escortait ton ombre
Eve disait : dieu que la terre est lente
et le bleu de Prusse du ciel
se mêlait aux touches de la palette
Gaëlle en inspirait les couleurs

Je t'écris je rêve sur cette marge
sous cette aile qui se met à battre
le coeur jaune d'un tournesol
l'agile navette du tisserin
et la ciboulette de Chine
que Mei a plantée
au pied du cyprès pendulaire

C'était Augustin Meaulnes
qui passait dans l'allée
nous le saluions de concert
et les feuilles sous ses pieds
bruissaient comme les mille
mailles d'un rideau de perles
agitées par un vent coulis

Eve ajoutait : j'ai de mes yeux vu
l'Instant premier se défaire
de la cielleuse immobilité
lançant le temps universel
la synchronie inachevée des sphères

Dieu que la terre est lente
j'ai marché dans les étoiles
nommé les constellations
peau expeausée d'un univers
libéré de lui-même aveugle aussi bien
que me restait-il au juste si ce n'est
l'intériorité même d'un extérieur infini

Je t'écris je rêve sur cette marge
où l'eau sculpte indéfiniment la pierre
ce qui se brasse et se rassemble jusqu'au vertige
les étoilements fleuris des cristaux
les ciselures des récifs de corail
déjà le Matin nous disait
à demi mots la bonne aventure

sur l'ocre clair où réapparaissait
l'Hélène de mon enfance
qui me donnait le chemin
et la solennité magique du poème
fleuri dans une simple goutte d'eau
et simple goutte d'encre

                        Daniel Martinez

10:05 Publié dans Eden | Lien permanent | Commentaires (0)

01/05/2015

Poèmes à Gaëlle, XV

XV

Quand elle dort les bras en croix
j’entends remuer doucement sur eux-mêmes
les volets à petites lamelles grises
et s’esquisser les mains du monde

La pluie touche le carreau
on perçoit sa respiration
le cœur sous la cage thoracique
pousse un peu
le présent
que je vois
se recomposer à mesure

Ferait-il froid elle aurait dans son somme
piqué de lave rouge sang quelques bûches
du plus beau chêne dans le foyer
où se délite à mesure le mufle de la nuit
dans la transparence de l’immense vitrage

Ses cheveux châtain lui flottent sur le front
Gaëlle rêve de ces ondulations profondes de la mer
qui s’achèvent en chocs sourds

sur les rochers de mon enfance
partagée par de longs murs au bord des chemins

par-dessus lesquels on voyait des oliviers
puis des femmes aux yeux doux et brillants
en ramasser les fruits sur de vastes
draps de couleur pour les replier ensuite
ils ont l’étrangeté de corps vivants

à ce moment de la nuit et de la vie
aussi pleins de nous-mêmes
et si peu maîtres de nous
qu’il en émerge des mots

comme des mains sauves
font bouger les images
dans les échancrures
de l’horizon rapproché

              Daniel Martinez

23:57 Publié dans Eden | Lien permanent | Commentaires (0)