07/09/2020
"La Lumière de l'origine", Alain Suied, éditions Granit, 1988, 100 pages
Un poète de qualité, Alain Suied (1951-2008), né à Tunis (où j'ai dans le temps effectué mes études secondaires, au lycée de Mutuelleville précisément) qui a su traduire mieux que quiconque Dylan Thomas, Paul Celan, John Keats, William Blake (...), mais aussi et surtout un être d'une grande modestie. Il a publié, faut-il le rappeler ?, dans Diérèse.
A lire ou/et à relire : La lumière de l'origine, un recueil paru aux éditions Granit, dirigées par François-Xavier Jaujard. Extrait d'une lettre qu'il m'adressa peu de temps avant de tirer sa révérence, je vous en reproduis les dernières lignes, si justes :
Le présent désenchanté et aphone que nous traversons nous amène à redoubler d'attention, d'écoute, d'espoir. Mais n'est-ce pas toujours le fardeau lumineux du poète ?
Dans la proximité,
Avec gratitude,
Alain Suied
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05/09/2020
"La forge froide de mars", de Daniel Klébaner, éd. Fata Morgana, 6 octobre 1986, 64 pages
La lanterne sourde
Enfant d'âge scolaire, je disséquais l'oursin. Je cherchais parmi les piquants et la substance amère, un point dont je ne parvenais pas à admettre l'existence, ni le nom : la Lanterne d'Aristote.
Toujours intrigué qu'"oursin" pût contenir un nom d'un autre ordre que celui de l'animal marin, je tentais cependant le rapprochement avec le falot, le fanal maritime.
Mais je donnais surtout un autre sens à "lanterne sourde". Au lieu d'être celle dont on peut cacher la lumière à volonté, elle devenait une manière de dire cette lanterne ursine.
Daniel Klébaner
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04/09/2020
Bestiaire : La Libellule, variations autour d'un dessin de Pacôme Yerma
Histoire de la Libellule
dessin à la mine de plomb de Pacôme Yerma
Ainsi que langues de l'éther
sur le ventre du coteau
en l'alchimie lente
que le profond déplace
elle est larve aveugle
mais libellule déjà
brodée d'un jaune de Naples
qui sonne comme un cristal
Elle est celle
que l'on approche d'un pas
pour tenter de surprendre l'invisible
bordant le limbe des feuilles
sous le flux dont Lucrèce parlait
entré en résonance
avec le monde de nos images
Printemps est là irrésistiblement
Celle dont les deux vies
n'en font plus qu'une
quand passant de l'état de larve
à celui d'insecte ailé
les deux éléments fusionnent
par le nimbe d'une blessure
d'où la Forme s'est extraite
par alliances successives
Là précisément
à partir d'une ligne fixe
la pellicule moirée de la peau
se déchire graduellement
laissant échapper le thorax
puis la tête avoisinante
une sphère aux yeux globuleux
pareillement les ailes se déplient
à mesure se déploient
éprouvent la pesanteur
sous la diurne rosée
tout un théâtre d'échanges
Signet d'écume posé
sur une tige de menthe
ou faux mouvement
de ce petit corps sec
qui de sa hauteur décrit
dans les vapeurs de l'eau
les déliés de l'écriture
d'une langue morte
où le sable et la cendre
auraient su conserver
nos impressions premières
les rides de l'univers originel.
Daniel Martinez
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