16/06/2019
Écrire, pour Blaise Cendrars (1887-1961)
De Frédéric Sauser, Frédéric-Jacques Temple qui fut son ami parlera comme de "cette voix qui restera parmi les plus humaines, les plus singulières et les plus fortes qui aient retenti dans notre époque pour proclamer que "la sérénité ne peut être atteinte que par un esprit désespéré, et pour être désespéré, il faut avoir beaucoup aimé et aimer encore le monde". Le contraire du pessimisme, de l'absurde et de l'abandon."
Écrire
Ma machine bat en cadence
Elle sonne au bout de chaque ligne
Les engrenages grasseyent
De temps en temps je me renverse dans mon fauteuil de jonc et je lâche une grosse bouffée de fumée
Ma cigarette est toujours allumée
J'entends alors le bruit des vagues
Les gargouillements de l'eau étranglée dans la tuyauterie du lavabo
Je me lève et trempe ma main
Ou je me parfume
J'ai voilé le miroir de l'armoire à glace pour ne pas me voir écrire
Le hublot est une rondelle de soleil
Quand je pense
Il résonne comme la peau d'un tambour et parle fort
Blaise Cendrars, in Feuilles de route
avec 8 dessins de Tarsila do Amaral. Paris, Au Sans Pareil, 1924.
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13/06/2019
Gao Xingjian : "Esprit errant pensée méditative", Ed. Caractères, mai 2016
Ne voulant pas m'exposer à la reproduction sans autorisation d'un poème choisi dans l’œuvre poétique complète de Gao Xingjian, intitulée "Esprit errant pensée méditative", illustrée par l'auteur et traduite du chinois par Noël Dutrait, je me contenterai de vous conseiller la lecture de ce livre hors du commun. Un livre qui est bien plus qu'un exercice du regard, "où la poésie/ n'est en rien un simple jeu du langage" mais infiltre le réel - créant dans l'instant même des rapports d'approche et de distance - pour le condamner quand il se doit, sans jamais se laisser emporter par lui. Un réel insuffisant donc, avec lequel composer autant que faire se peut, dans un chorus de signes et de lueurs qui ajustent l'horizontal à son échelle de rayons, élargissant sans cesse les contraintes physiques des yeux... "Dieu/ ouvre un œil tout rond/ garde l'autre fermé/silencieux/ il écoute seulement".
Cette dimension méditative, au long du temps et de l'histoire, au sein de l'espace, emporte tout le reste dans un territoire qui n'en est pas un, où le poète pas à pas efface le futile pour ne conserver que l'essentiel, redoutant plus que tout "le Deuil de la beauté" et toujours désireux de capter "l'Essence de la douceur" (titre de l'une des quatorze peintures de Gao Xingjian dans ce livre, celle-ci datant de 1997)...
L'homme est d'une simplicité qui pourrait passer pour désarmante, un regard vif encore, chargé d'une histoire qui ne fut pas tendre pour lui ; il vit en France depuis 1984. Sa maîtrise de la langue française est évidente, même s'il écrit généralement dans sa langue mère. Sa poésie (sachant que l'auteur "ne (se) reconnaît pas comme poète" mais se définit plutôt comme "un ermite/ à la marge de la société") baigne dans un climat particulier où passé, présent et futur se confondent pour épouser le sillage d'un être singulier. Un être attaché à sa liberté, pris au miroir de la création, indivisible, jamais réductible au devenir de l'humanité dans ses errements. Son errance à lui, se prolonge au travers de ce qu'elle devient dans ses vers, sans port d'attache ni "itinéraire fixe". DM
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04/06/2019
Matthieu Messagier, in Diérèse 64
Quelques pages du Journal de Matthieu Messagier, qui m'envoie par ce pli des originaux dont il n'a pas fait de copie (marque de confiance qui me touche, comme de juste) : "Les arts blancs & la varicelle (débris d'un journal éperdu)". Amitiés partagées, Daniel Martinez
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