13/05/2019
"Plusieurs vols d'étourneaux", de Bertrand Degott aux éd. Les Deux-Siciles, juin 2003
A l'enseigne des Deux-Siciles, a paru il y a près de seize ans Plusieurs vols d'étourneaux, de Bertrand Degott (7 €). Dix-septième livre de la collection Poésie, imprimé par mes soins à Fontainebleau, dont voici deux pages entre toutes.
Cet opus, après la publication par Bertrand Degott chez Gallimard de Éboulements et taillis (1996) et Le Vent dans la brèche (1998) ; avant Battant (La Table ronde, 2006), À chaque pas (L’Arrière-Pays, 2008) — et une « mise en vers français » des Sonnets de Shakespeare (La Table ronde, 2007). E la nave va... comme l'écrivait Guiseppe Ungaretti.
Bertrand Degott
11:21 Publié dans Auteurs, Editions | Lien permanent | Commentaires (0)
01/05/2019
Pierre Oster : deux pages corrigées de sa main pour Diérèse 48/49
La revue Diérèse et les éditions Les Deux-Siciles (allusion historique oblige) ne font qu'un, même si la revue, qui comptera début juin 76 numéros (soit 15 000 pages à son actif) a pris le pas sur les éditions, qui n'en comptent qu'une quarantaine (je suis incapable de vous donner le nombre exact des livres et recueils publiés et d'ailleurs, je n'y tiens pas vraiment, n'étant pas comptable, loin s'en faut). Sachez déjà que le premier titre de mes éditions voit les débuts de Christophe Manon avec "Les Treize empereurs", préfacé et illustré par Pacôme Yerma. Ma devise ? "Je laisse le fiel et vais vers les doux fruits" (Lascio lo fele e vo per dolci pomi). Le tout réalisé sans subventions, en somme les mains libres (désolé je ne suis pas banquier non plus).
Pour votre plaisir, voici pour aujourd'hui l'un des textes les plus marquants à mon sens parus dans la revue, d'autant plus émouvant à la relecture qu'il y eut entre nous quatre jeux d'épreuves, l'auteur, Pierre Oster, ajoutant à mesure à son dire. Ce concept de "parfait sensible" mériterait à lui seul un long développement, tant l'idée de perfection nous est consubstantiellement étrangère. Une sensibilité qui regarde en propre le poète, sur les chemins du monde. DM
Miettes non-philosophiques
(5/2/10)
Ne te confine pas dans l'illusion d'une maîtrise indécise. Déjà l'échec est avéré pour qui regarde un voile de poussière.
Il est des plus injuste de m'imputer à crime mon indifférence à ce qui s'évanouit. Des plus injuste et des plus juste aussi bien.
Un poète inconnu complètera l'ultime série des rimes ; et ce sera - en dehors de nous - le plérôme vers quoi l'esprit nous guide en exaltant l'idée d'un parfait sensible.
De l'abrupt, ou de l'irrégulier, ou de l'infime. Invitation à une manière de constant retour à l'indéchiffrable.
Je m'identifie, je m'intègre au principe courant de phrase en phrase ; au feu d'une métaphore initiale et vraie ; à quelque monosémie inaccomplie...
L'abîme se trouve à portée du voyageur, mais non pas l'empire que dessine la configuration d'une seule feuille.
Du vieil écheveau je tire un fil. Les choses cependant demeurent telles. Le drame dans sa simplicité perdurera.
Ce qui brûle avec la joie ne la détermine pas. Elle est une puissance de liberté inspirée, de renouveau sans frein dans l'assujettissement.
Aller d'un pôle à l'autre de la planète morale... Du langage au silence (en ce qu'il a de plénier). Du silence au langage (en son ampleur).
Des cris, des plaintes, des mots longtemps murmurés nous incorporent par hasard à la terre. Nous les écoutons, nous leur échappons.
Nos compagnonnages présentent un caractère d'improvisation parce que nous sommes à nous-même des limites obscures.
Supplique reçue jusque dans les aspirations du vent. Quotidienne et changeante et subtile. A qui n'est-il loisible d'en aimer la loi ?
Faire partie, avoir partie liée. Le céder de front à la multitude. N'ignorer rien de ce qui passe notre petitesse.
L'âme comme réalisation ultime. Comme manifestation d'une ductilité souveraine. Comme amorce d'une fusion d'essence orphique, élément de base d'une philosophie du contact.
Pierre Oster
18:38 Publié dans Auteurs, Diérèse | Lien permanent | Commentaires (0)
22/04/2019
Une lettre de Juliette Drouet à Victor Hugo : 13/10/1854
Jersey, 13 octobre, vendredi midi et demie
Il est bien vrai, mon trop bien-aimé, que j'ai l'audace de faire courir mes pattes de mouche sur votre majestueux museau de grand lion sans aucune espèce de crainte ni de timidité. Cela tient à la conscience que j'ai de mon infirmité, eu égard à votre puissante et fauve personnalité. Il n'en est pas de même quand je m'adresse à des êtres plus ou moins englués de bourgeoisie et de préjugés ; je sens qu'il y a là un danger pour moi et que le moins qu'il pourrait m'arriver serait d'y perdre ma liberté... d'esprit (de mouche). Avec vous je ne cours pas le même péril et je vagabonde en toute confiance autour de vous. D'ailleurs est-ce qu'il est possible de mal dire : je t'aime. Qu'on l'écrive en latin, en grec, en busulban, en baobétan, en chinois, en sanskri ou en charabia ? Je thème, je tème, je t'aime et même je t'aibe ? Tout cela est autant de diamants tirés de la mine inépuisable de mon amour. Le style lapidaire, lui-même, ne saurait y ajouter la valeur d'un iota. Mais la vile multitude préfère de beaucoup un bouchon de carafe taillé à facettes, voilà pourquoi j'ai si peu de goût à me montrer à elle dans toute ma simplicité brute et même brutale. Ce qui fait que notre Juju est muette et qu'elle aime mieux la foudre sur sa tête que son visage devant le sun. Cela ne m'empêche pas d'être bien touchée et bien reconnaissante de la peine que tu prends de te substituer à moi dans des occasions dangereuses, comme celle d'hier. Si je pouvais t'en aimer plus, je le ferais ; mais, à l'impossible nul n'est tenu, fût-on trois fois Juju. Je t'expliquerai cela tantôt quand je te verrai. D'ici là, je me livre au rognonage dans mes toiles et dans mes calicots achetés hier et puis je vous attends les ailes ouvertes, le cœur et l'âme à l'unisson.
Juliette Drouet
10:33 Publié dans Auteurs | Lien permanent | Commentaires (0)