30/09/2016
Un poème automnal de Rouben Mélik (1921-2007)
Sonnet
du pays nocturne
Dans ce grand mouvement d'automne où j'entre avec
Ma force neuve, à peine est-ce d'un corps durable
Et trop la nuit me hante encore mesurable
Si morte la mémoire et le cœur mis à sec.
Offrande du soleil que vient trouer le bec
De l'oiseau déchiré, sois la part séparable
Et le partage fait d'un coin de terre arable
Où moisit la moisson dans l'oubli d'un échec.
Chaque mot d'être dit limite la lumière
A l'espace brutal de la mort coutumière
Où la saison finit. Dans ce Grand mouvement
D'automne où j'entre avec mon ancien héritage
Je décompose l'ombre et je suis mon otage,
Contre toi, soleil, face à Toi qui me démens.
Rouben Mélik
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04/06/2016
Printemps, es-tu là ?
L'air des mots un égard échangeur
(et reprend très loin le pâle tracé d'une route
muée en un bouillonnement violet-rouge
sous le crépuscule semblablement)
quand s'envolent aux créneaux des branches
les colombins à l'avenant plumes aux macules
plus noires que calame le temps de fermer l'œil
mon sujet d'âme y puise vive
ta propre conviction face à tout.
Daniel Martinez
04/6/2016
13:05 Publié dans Poèmes | Lien permanent | Commentaires (0)
03/03/2016
Un lointain fredon
i.m. Jean Grosjean
Une douceur est là, présente dans l'air, une clarté rousse, qu'imprègne la mémoire des hauts feuillages, piqués de gouttelettes vertes. Tout lentement se diffracte dans l'indéfini.
Une rumeur dorée, grave, profonde, l'odeur poivrée du chemin qui monte - à travers toutes sortes de distances, de nouveau quelque chose en nous est atteint, chaque jour renouvelle sa réponse, le spectacle et l'écho.
Menues particules qui dansent, palpitent tel un coeur. On devine où se fond l'argile du visage, confronté à la part du dieu, dans le jeu des roseaux qu'agite un bruissement soyeux, l'inconcevable vérité de l'être dans le monde.
Les nuages ont tracé derrière eux, suivant une chronologie simple, les rythmes et le Temps d'une enfance que seul retrouve le poète.
Cette impression, les yeux fermés, de voir se perdre dans le paysage les lueurs d'un autre âge ; tout aussi bien, d'être là, derrière les cloisons d'une maison de verre, absorbé : devant l'écume des nuées, ses laisses vives et brusques dissolutions.
Dans le déchirement de l'air, apprendre le recueillement, si sans cesse nos désirs frayent avec les trop violents contrastes. Saisis au biais de l'oeil, nul n'en achève la chronique.
La misère et la beauté. Au pied du mur qu'il nous faudra franchir, l'exaltation soudaine d'un essaim de passereaux. Ou ce jet de colombes à l'instant qu'a choisi un filet de brouillard pour se dissoudre entre nos mains.
La figure s'éloigne et la voix passe. Quand l'écarlate du vitrail perce le gui du peuplier, l'oreille, parée des syllabes longues de l'espace mesure l'intermède crépusculaire.
La tête inclinée, touchée par une vague d'ombre, dans les lisières du sommeil ou de la fin promise. Quand tournent les sens, sous l'immensité circulaire.
Toi, à qui je parle depuis ma nuit, derrière les soyeuses ondulations du rideau brodé de vent, dans la chambre de l'esprit, le domaine pur des nombres et des reflets.
Daniel Martinez
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